Par Calvin Freiburger — Traduit par Campagne Québec-Vie — Photo : olinchuk/Adobe Stock
12 septembre 2024 (LifeSiteNews) — Depuis que la vice-présidente et candidate démocrate à la présidence Kamala Harris a insisté sur le fait que « nulle part en Amérique une femme ne mène une grossesse à terme et demande un avortement », lors du débat présidentiel de mardi, les médias grand public se sont ralliés pour présenter l’avortement tardif et l’infanticide comme des mythes de droite, en dépit d’un dossier factuel liant les démocrates à ces deux problèmes très réels.
L’ancien président et candidat républicain Donald Trump a accusé les démocrates de soutenir « l’avortement au neuvième mois » et « l’exécution après la naissance », ce qui a déclenché une vague de « vérifications des faits » de la part de la presse :
- CNN : « Les origines de la fausse affirmation de Trump selon laquelle les démocrates veulent autoriser l’“exécution” des bébés après la naissance ».
- CBS News : « Trump prétend à tort que les démocrates soutiennent les avortements “après la naissance”. Voici une vérification des faits ».
- NBC News : « Trump a fait de fausses déclarations sur l’“avortement tardif” pendant le débat, selon des experts ».
- NPR : « Trump répète la fausse affirmation selon laquelle les démocrates soutiennent l’avortement “après la naissance” lors du débat ».
- USA Today : « Aucun État n’autorise les gens à “exécuter le bébé” après la naissance, comme le prétend Trump lors du débat ».
Bien que Trump n’ait pas expliqué la situation au-delà de l’invocation des commentaires tristement célèbres de l’ancien gouverneur démocrate de Virginie, Ralph Northam, en 2019, défendant l’option de laisser mourir un enfant mis au monde vivant à la suite d’un avortement raté, le dossier montre que des avortements tardifs se produisent, que les lois existantes ne suffisent pas à les empêcher et que la plupart des démocrates nationaux, y compris Mme Harris, s’opposent à ce que l’on fasse quoi que ce soit pour y remédier.
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Les données
Selon les données des Centres américains de contrôle et de prévention des maladies (CDC) et de l’institut pro-avortement Guttmacher, examinées par l’institut pro-vie Charlotte Lozier (CLI), si plus de 90 % des avortements ont lieu au cours du premier trimestre, plus de 50 000 avortements par an ont lieu après 15 semaines (près de quatre mois de grossesse), et environ 10 000 après 20 semaines (cinq mois).
En outre, CLI documente que diverses sources pro-avortement affirment que la plupart de ces avortements ne sont pas demandés pour des soi-disant « urgences médicales » extrêmes, comme le prétendent leurs défenseurs. Un rapport de Guttmacher de 2013 admet que « les données suggèrent que la plupart des femmes qui cherchent à avorter plus tard ne le font pas pour des raisons d’anomalie fœtale ou de mise en danger de leur vie », et les données publiées par le célèbre avorteur Warren Hern lui-même montrent que les « anomalies fœtales » ne concernent qu’un cinquième à un tiers de ses patientes — et que la plus courante de ces « anomalies » est la trisomie 21, une condition qui n’est ni une condamnation à mort, ni même la garantie d’une vie malheureuse. En tout état de cause, l’avortement direct est toujours gravement immoral et n’est jamais nécessaire ni justifié pour des raisons de « santé ».
Pour mettre en perspective les chiffres de l’avortement tardif, Lyman Stone, démographe à l’Institute for Family Studies, écrit : « Les avortements après 32 semaines représentent une très faible part du total des avortements — peut-être 0,5 % ».
Cela représenterait 5 000 avortements du troisième trimestre, ce qui, bien qu’il s’agisse d’un chiffre apparemment faible pris isolément, constitue 2 homicides sur 10 aux États-Unis et serait « la deuxième cause de décès chez les personnes de moins de 18 ans (après l’immaturité congénitale) ».
Quant à l’incidence de l’infanticide, « bien que les États-Unis n’enregistrent pas de données fiables sur les survivants de l’avortement, nous avons estimé, grâce aux extrapolations [des données] du gouvernement canadien, que 1 734 enfants naissent vivants après une procédure d’avortement ratée chaque année aux États-Unis », déclare le Réseau des survivants de l’avortement (Abortion Survivors Network). « En d’autres termes, environ 2 avortements sur 1 000 aboutissent à une naissance vivante. Après 49 ans et demi de Roe v Wade, 85 817 bébés ont survécu à une procédure d’avortement ».
En septembre 2024, le Family Research Council (FRC) a écrit que « les statistiques des rapports d’avortement de neuf États montrent qu’au moins 277 enfants ont survécu à l’avortement depuis 2006 ». Seuls huit États exigent la communication de telles données, et il n’existe pas d’exigences fédérales en la matière, ce qui garantit que le chiffre réel est plus élevé. Plusieurs anciens responsables de l’industrie de l’avortement et des spécialistes de la politique ont déclaré au Congrès ou admis sous serment que l’infanticide après un avortement raté se produit sans que les chiffres officiels ne le mentionnent.
La loi
Au 29 juillet 2024, neuf États — l’Alaska, le Colorado, le Maryland, le Michigan, le Minnesota, le New Jersey, le Nouveau-Mexique, l’Oregon et le Vermont — ainsi que le District de Columbia « ne restreignent pas l’avortement en fonction de la durée écoulée de la gestation », selon Guttmacher, ce qui signifie que l’avortement peut être pratiqué jusqu’au neuvième mois, quelle qu’en soit la raison. En outre, « le Maine autorise l’avortement après le seuil de viabilité du fœtus lorsqu’un médecin le juge nécessaire » et donne aux avorteurs un pouvoir discrétionnaire illimité pour décider de ce qui constitue une « nécessité ».
L’infanticide est techniquement illégal au niveau national en vertu de la loi fédérale de 2002 sur la protection des enfants nés vivants (Born-Alive Infants Protection Act — BAIPA). Cependant, la BAIPA « n’a pas directement créé de sanctions civiles ou pénales », comme l’a admis un article de PolitiFact en 2019 (qui a néanmoins donné à Trump la note « faux » sur le sujet, que LifeSiteNews a disséqué à l’époque). Cette loi était « édentée et purement symbolique », selon l’article qui citait Dwight Duncan, professeur de droit à l’université du Massachusetts et membre du Pro-Life Legal Defense Fund.
En septembre 2024, seuls 18 États disposeront de lois exigeant des soins médicaux pour les enfants nés vivants après une tentative d’avortement, selon la FRC, ce qui laisse les avorteurs libres de commettre des infanticides dans la majorité du pays.
Les démocrates
Pour remédier aux lacunes de la BAIPA, les républicains du Congrès ont proposé à plusieurs reprises la loi sur la protection des survivants de l’avortement (Born-Alive Abortion Survivors Protection Act — BAASPA), qui exigerait que les nouveau-nés survivant à l’avortement bénéficient du « même degré de compétence, de soin et de diligence professionnels » que celui qui serait accordé à la suite d’une naissance prévue, et qu’ils soient ensuite « immédiatement transportés et admis à l’hôpital ». Les médecins contrevenants risquent jusqu’à cinq ans de prison, et ceux qui vont au-delà de la négligence délibérée et commettent un « acte manifeste » pour tuer le nouveau-né sont punis en vertu de la loi fédérale existante sur le meurtre.
La BAIPA a été adoptée à l’unanimité par le Congrès il y a vingt ans, mais au cours de la décennie écoulée, les démocrates du Congrès ont toujours voté contre la BAASPA et la Pain-Capable Unborn Child Protection Act (Loi sur la protection des enfants à naître capables de souffrir), qui interdirait les avortements volontaires après cinq mois, à l’exception des cas de viol, d’inceste et d’« urgences médicales ». Comme le souligne Susan B. Anthony Pro-Life America (SBA), Mme Harris a elle-même voté contre chacune de ces mesures à deux reprises lorsqu’elle était sénatrice américaine.
Comme elle l’a fait lors du débat de mardi, Mme Harris a toujours refusé d’identifier un point précis à partir duquel elle accepterait de restreindre l’avortement. Elle et le président sortant Joe Biden ont tous deux demandé à plusieurs reprises le rétablissement des dispositions de l’arrêt Roe v. Wade, qui autorisait ostensiblement la restriction de l’avortement après la viabilité tant que des exceptions liées à la « santé » étaient autorisées, mais qui laissait la définition de la « santé » à l’arrêt Doe v. Bolton, qui l’accompagnait et qui stipulait que le « jugement médical » devait être autorisé à prendre en compte « tous les facteurs — physiques, émotionnels, psychologiques, familiaux et l’âge de la femme — pertinents pour le bien-être de la patiente ».
Biden a spécifiquement approuvé la loi dite « Women's Health Protection Act » (WHPA), également soutenue par Harris, qui interdirait aux États d’adopter toute loi qui non seulement interdirait l’avortement, mais serait « raisonnablement susceptible de retarder ou de décourager » ou d’augmenter « indirectement » le coût de l’avortement. Comme dans le cas de l’arrêt Roe, le projet de loi autorise les restrictions après le seuil de viabilité des bébés hors de l’utérus, mais laisse aux avorteurs le soin de décider si un avortement après ce seuil est « nécessaire » pour la « santé » de la mère.
Le colistier de Mme Harris, candidat à la vice-présidence, le gouverneur du Minnesota Tim Walz, a signé l’année dernière la loi dite « Protect Reproductive Options (PRO) Act », qui déclare que l’avortement jusqu’à la naissance est un « droit fondamental ».
La politique
Depuis que la Cour suprême des États-Unis a annulé l’arrêt Roe en 2022, les sondages et les initiatives électorales en faveur de l’avortement ont effrayé de nombreux républicains qui ont adopté une position plus défensive sur le sujet. Cependant, les sondages montrent aussi régulièrement qu’une nette majorité reste opposée à l’avortement tardif.
En juin 2023, un sondage du Tarrance Group commandé par la SBA a révélé que 77 % des personnes interrogées étaient favorables à la limitation de l’avortement volontaire aux 15 premières semaines. L’enquête sur l’avortement de janvier 2024 par le Marist Institute, commandée chaque année par les Chevaliers de Colomb, a révélé que seuls 42 % des Américains sont favorables à ce que l’avortement volontaire reste généralement légal après le premier trimestre, et seulement 29 % après le deuxième trimestre, tandis que 33 % seulement pensent que l’avortement ne devrait pas avoir de limites.
Gallup a constaté en juin 2024 que si le grand public s’identifie davantage comme « pro-choix » que comme « pro-vie », seuls 35 % d’entre eux estiment qu’il devrait être légal « en toutes circonstances ».