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Une société pro-vie est une société religieuse non libérale

Par Georges Buscemi, président de Campagne Québec-Vie — Photo : AllaSerebrina/Depositphotos

Le renversement de la décision Roe v. Wade aux États-Unis l’an dernier a pu faire croire à certains qu’un changement tectonique était en cours en faveur de la protection de la vie à naître aux États-Unis et dans le monde. Toutefois, cette étonnante victoire pro-vie, qui abolit tout prétendu « droit » à l’avortement aux États-Unis et accorde aux États le droit de limiter — ou de libéraliser — l’avortement comme ils l’entendent, pour historique qu’elle soit, devrait motiver les pro-vie à approfondir leur vision de la bataille contre l’avortement, s’ils souhaitent réaliser des progrès à long terme. En effet, comme je l’ai soutenu ailleurs, la lutte contre l’avortement est symptomatique d’une bataille culturelle plus profonde entre deux visions du monde opposées : la première est une vision du monde « libérale » areligieuse, et la seconde une vision du monde non libérale et religieuse. Si la chute de l’arrêt Roe est une bonne nouvelle pour les pro-vie, la défaite finale de l’avortement dépendra de la réussite de chaque pays à rejeter la vision du monde « pro-choix » ou libérale et à adopter la vision religieuse du monde, tant au niveau individuel que sociétal.

Mon diagnostic semble avoir été au moins partiellement confirmé par une récente étude du Pew Research Center sur les attitudes mondiales à l’égard de l’avortement et de la religion. Publiée le 20 juin, cette enquête internationale portant sur 24 pays d’Amérique, d’Europe, d’Afrique et d’Asie révèle tout d’abord une vérité troublante, à savoir que les attitudes favorables à l’avortement légal prédominent en Europe et en Amérique du Nord. Au Canada, par exemple, plus de 75 % de la population est d’accord pour dire que l’avortement devrait être légal dans tous ou la plupart des cas, alors que 17 % souhaitent qu’il soit illégal. Au Royaume-Uni, 84 % de la population est favorable à la légalisation de l’avortement et 14 % s’y oppose, tandis qu’aux États-Unis, 62 % pensent que l’avortement devrait rester légal dans tous ou la plupart des cas, tandis que 36 % affirment le contraire. Dans certains pays européens, la situation est bien plus désastreuse : en Suède, par exemple, une écrasante majorité de 95 % de la population pense que l’avortement devrait être légal dans tous ou la plupart des cas, avec un reste à peine mesurable de 2 ou 3 % qui pense le contraire.

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Mais ce que je considère comme la partie la plus intéressante de cette étude est la démonstration que les attitudes à l’égard de l’avortement sont très étroitement liées aux attitudes à l’égard de la religion. Cette étude montre que, pays après pays, à quelques rares exceptions près, l’adhésion religieuse (ou l’absence d’adhésion) permet précisément de prédire si le pays sera disposé ou non à légaliser l’avortement. En Indonésie, par exemple, où 97 % des 274 millions d’habitants jugent la religion « très » importante, 83 % d’entre eux pensent que l’avortement devrait être illégal dans tous les cas ou dans la plupart des cas. À l’inverse, au pays d’Ikea (Suède), où 95 % des habitants sont d’accord pour dire que l’avortement devrait être légal dans tous les cas ou dans la plupart des cas, 74 % d’entre eux estiment que la religion n’est pas du tout ou pas trop importante pour eux. En d’autres termes, plus on est religieux, plus on est pro-vie et, inversement, plus on est areligieux, plus on est « pro-choix » ou favorable à l’avortement légal.

Je pense que cette relation très forte entre les attitudes à l’égard de l’avortement et les opinions sur la religion est plus qu’une coïncidence. S’il est vrai que la question de l’avortement n’est pas une question religieuse ou théologique en soi, elle repose sur la conception que l’on a de ce que signifie être humain et pourquoi cela importe. Et cette question — ce que signifie être humain, notre place dans le cosmos, et la raison pour laquelle il importe qu’un être humain innocent soit tué ou non — est intimement liée à la question de l’existence d’un Dieu créateur à qui nous devons notre existence et à qui nous devons adoration, remerciement et obéissance.

Le respect de la vie humaine innocente, même s’il n’est pas rejeté en principe par la vision libérale du monde, est subordonné au soi-disant droit de l’individu à choisir ce qu’il pense être le plus important pour lui. Les politiques libérales en Europe, au Royaume-Uni et en Amérique du Nord laissent largement aux individus le soin de décider du bien ou du mal, et des questions de vie et de mort. C’est une terrible nouvelle pour les enfants à naître, dont la vie est littéralement suspendue à l’opinion actuelle de leur mère sur l’inviolabilité de la vie humaine innocente. Dans les sociétés religieuses non libérales, en revanche, le « droit de choisir » d’un individu est subordonné à la nécessité de respecter les commandements d’un Dieu créateur. Si cela laisse moins de place à l’initiative personnelle, cela ferme très souvent la porte à des crimes tels que l’avortement.

Mais les effets néfastes du libéralisme se font sentir bien au-delà des frontières de la justice. Le libéralisme, qui met l’accent sur le « choix » avant toute autre considération, érode même le concept de rationalité commune qui permet à la société de justifier rationnellement et de mettre en œuvre ses objectifs sociétaux. En effet, le libéral croit en fin de compte que l’opinion de chacun sur ce qui est vrai ou faux d’un point de vue moral ou même scientifique est une question purement subjective ou individuelle. La décision déroutante de la Cour suprême des États-Unis dans l’affaire Casey v. Planned Parenthood de 1992 (qui a ratifié l’arrêt Roe v. Wade et a donc été annulée avec lui), résume parfaitement, en une phrase stupéfiante, l’idéologie du libéralisme lorsqu’elle déclare : « Au cœur de la liberté se trouve le droit de définir sa propre conception de l’existence, du sens, de l’univers et du mystère de la vie humaine ». Mais si l’on a le « droit » de définir « sa propre conception de l’existence » et « le mystère de la vie humaine », cela signifie que l’on a le droit de définir la virilité, la féminité et l’humanité. Et voilà, c’est ce que nous voyons aujourd’hui dans les sociétés libérales : le mouvement « trans » considère comme inviolable le droit d’un individu à décider ce que signifie « mâle » et « femelle », tandis que le mouvement « pro-choix » considère comme sacré le droit de déterminer à quel moment de la gestation la vie humaine existe. Dans un tel contexte, la base d’un débat raisonné sur n’importe quel sujet moral et même scientifique s’évapore, et il ne reste que les opinions contradictoires d’individus atomisés, dont les plus forts et les plus riches finissent par l’emporter sur les plus pauvres et les plus faibles. La vérité et les enfants à naître en pâtissent.

En fin de compte, le mouvement pro-vie doit être un mouvement pour le respect de la vérité religieuse et morale dans la société, contre le libéralisme occidental qui bannit la question de la vérité sur Dieu, l’homme, et la moralité dans le domaine du « choix personnel ». Si cette étude du centre Pew peut susciter chez certains le désespoir quant à l’avenir du mouvement pro-vie, j’espère que pour la plupart des pro-vie, elle servira de seau d’eau glacée bienfaisant sur la tête, nous réveillant à la réalité que l’on ne gagne rien à mettre de côté les « questions religieuses », mais que l’avenir du mouvement pro-vie et la vie des enfants à naître dépendent de la capacité des individus et de la société à être non-libéraux et religieux.



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