Le Père Frank Pavone (au centre).
Par Kennedy Hall — Traduit par Campagne Québec-Vie — Photo : American Life League
19 décembre 2022 (LifeSiteNews) — Alors que la nouvelle de l'inattendue réduction à l'état laïc du Père Frank Pavone se répand, des questions se posent sur la nature de cette action canonique, en particulier à propos de la présomption de blasphème et si une telle faute justifie une telle sanction.
Selon l’article original de Catholic News Agency (CNA) qui a révélé l’histoire non seulement au public mais aussi au prêtre lui-même, le Père Pavone a été laïcisé en raison — du moins en partie — de « communications blasphématoires sur les médias sociaux ».
On pense que son comportement prétendument « blasphématoire » sur les médias sociaux comprend une série de tweets datant de 2020. Le Père Pavone avait engagé une discussion sur Twitter avec un politicien pro-avortement, au cours de laquelle il a utilisé le nom du Seigneur de manière enflammée, offensant ainsi les gens.
Les tweets où il a utilisé un explétif ont maintenant disparu, mais le Père Pavone avait fait suivre le mot « God » du mot « damn » dans sa communication en ligne.
Que cela constitue ou non un blasphème formel n’est pas vraiment la question, car le Père Pavone a clairement indiqué qu’en postant de manière irresponsable, il s’était laissé emporter et que, dans son zèle à défendre les enfants à naître, il avait écrit quelque chose qu’il n’aurait pas dû.
Le rédacteur en chef de LifeSiteNews, John-Henry Westen, l’a expliqué dans une vidéo sur la question, en soulignant que le Père Pavone a lui-même admis qu’il n’aurait pas dû utiliser ce mot, qu’il s’était excusé et qu’il avait confessé tout acte répréhensible au confessionnal.
Un extrait d’une vidéo du Père Pavone a été inclus dans la vidéo de Westen, dans laquelle le prêtre dit que son évêque — Mgr Patrick Zureck — a déclaré que « le Père Frank a commis un blasphème parce qu’il condamne cette personne à l’enfer et dit que c’est Dieu qui fait cela ».
Le Père Pavone a gloussé et a demandé de façon rhétorique si Zureck « vivait sur la même planète » que le reste d’entre nous. « Parfois nous nous mettons en colère », a-t-il ajouté, « et parfois nous nous mettons tellement en colère que nous disons un petit mot méchant ».
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Il n’est pas nécessaire d’être un avocat canonique pour remettre en question la laïcisation d’un prêtre à cause d’un emportement dont on pourrait raisonnablement nier qu’il soit même mortellement pécheur, étant donné qu’il s’agissait d’un moment de passion et qu’il était motivé par un amour pour les enfants à naître et une haine juste de l’avortement, sans intention claire d’offenser Dieu ou de juger l’âme d’un homme.
Il est raisonnable de se demander s’il n’y a pas quelque chose de plus dans cette histoire.
Le bébé sur l’« autel » : Le père Pavone n’a rien « profané »
Certains pointent du doigt un moment de novembre 2016 où, dans le cadre de son travail pro-vie, le Père Pavone a filmé un bébé avorté sur ce qui semblait être un autel, dans le cadre d’une campagne visant à inciter les catholiques à soutenir le candidat de l’époque, Donald Trump, qui était légitimement pro-vie.
L’évêque Zureck a qualifié ce qui s’est passé de « profanation de l’autel ».
En fait, cette accusation de profanation d’autel ne tient pas puisqu’il s’agissait d’une table qui était parfois utilisée pour célébrer la messe et non d’un autel consacré de l’Église.
Maintenant, il se peut que ce soit de mauvais goût, et le Père Pavone a admis qu’il aurait dû utiliser un cadre différent pour éviter toute confusion, mais techniquement, il n’a rien profané.
En outre, le bébé a été donné au Père Pavone pour qu’il procède à un enterrement correct de ce pauvre enfant avorté.
Mon Dieu, nous parlons d’un prêtre à qui l’on a donné le corps avorté d’un enfant mort pour qu’il l’enterre dignement, et nous craignons qu’il n’ait raté la cible en lançant un appel sincère pour que cette folie cesse ?
Qu’est-ce qui ne va pas avec la hiérarchie de l’Église pour que beaucoup s’inquiètent davantage du fait que le Père Pavone ait fait quelque chose de mauvais goût et non du fait qu’un bébé littéralement mort lui ait été donné en raison du crime d’avortement ?
Pour être honnête, si quelqu’un me remettait un bébé avorté, je ne sais pas si j’aurais agi avec autant de calme et de mesure que le Père Pavone.
De plus, cette vidéo tristement célèbre n’est même pas citée comme cause de sa laïcisation, qui n’inclut que le blasphème présumé sur Twitter et sa « désobéissance persistante » à l’évêque.
Qu’en est-il de la loi ?
Encore une fois, supposons que les accusations de l’évêque du Père Pavone soient vraies et qu’il ait fait quelque chose de mal et doive être discipliné pour cela. Quelles seraient les sanctions adéquates dans ce cas ?
D’après une entrevue entre CNA et le Père Gerald Murray, éminent canoniste, ce qui a été fait au Père Pavone sent l’illégalité et les manœuvres juridiques illicites.
CNA a demandé au Père Murray si la punition correspondait au crime. Murray a déclaré : « ... le Code de droit canonique ne précise pas que les sanctions possibles pour ces deux infractions incluent le renvoi de l’état clérical ».
Le Père Murray a expliqué que la désobéissance pouvait être punie par diverses censures canoniques, mais que la révocation de l’état clérical n’est pas incluse dans les peines requises pour les péchés de désobéissance.
Un autre problème est que le Père Pavone a été informé qu’il ne pouvait exercer aucun recours canonique ni faire appel de la décision.
Le Père Murray a fait remarquer que cela était également illicite, car seul le pape, qui jouit du « plein et suprême pouvoir dans l’Église » (canon 332, 1), est en mesure de prononcer une telle sanction sans espoir d’appel. La sanction du Père Pavone a été prononcée par le Dicastère pour le clergé et communiquée par Mgr Christophe Pierre.
En outre, un futur pape pourrait annuler la décision, car il ne s’agit pas d’un acte infaillible de foi et de morale.
On pourrait en dire davantage, mais il est clair qu’il y a quelque chose d’incohérent dans l’affaire du Père Pavone.
Si j’étais un parieur, je dirais que la hiérarchie libérale s’en est prise à l’une des voix les plus puissantes du mouvement catholique pro-vie en Amérique pour en faire un exemple.
Je m’attends à ce que cette affaire fasse jurisprudence et que le Père Pavone soit le premier d’une longue série.