Participants à la Marche pour la vie de Québec portant une bannière de la Vierge. — Photo : Augustin Hamilton
Par le Père Francis Michael de Rosa — Traduit par Campagne Québec-Vie
Le 1er juin 2024, la ville de Québec a vécu un moment historique en accueillant sa toute première « Marche pour la vie ».
L’organisation à l’origine de l’événement était Campagne Québec-Vie qui, à mon avis, est exceptionnelle en raison de sa perspective distinctement catholique sur les « questions de vie » qui préoccupent tant la société moderne.
Non seulement Campagne Québec-Vie cherche à mettre fin à l’avortement, mais elle s’oppose explicitement aux autres maux qui menacent la vie humaine et l’amour humain : de la contraception à l’euthanasie, en passant par tous les maux intermédiaires. Ces maux sont les symptômes frères d’une fausse anthropologie désorientée par le néo-dualisme, et ils doivent être reconnus comme tels par le mouvement pro-vie afin de réinitialiser définitivement l’ordre moral selon la nature humaine et la raison droite adéquatement comprise. Pouvons-nous honnêtement envisager une société sans avortement, mais avec contraception ?
Peut-il vraiment y avoir une nation éprise de liberté qui s’en prend à son propre peuple ? L’hydre des péchés contre la vie et l’amour doit être coupée au niveau du cou pour réamorcer l’ordre moral.
Notamment, Campagne Québec-Vie est consacrée au Sacré-Cœur de Jésus par le Cœur Immaculé de Marie en union avec le Cœur Très Chaste de Joseph. L’union des « trois cœurs » de la Sainte Famille représente la communauté mystique d’amour qui a formé la Sainte Famille à Nazareth, qui est à son tour l’archétype mystique de la Sainte Église catholique. Nazareth est donc la maison ouverte pour accueillir toute l’humanité.
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De plus, Campagne Québec-Vie appelle au rétablissement du Règne social du Christ-Roi, une expression rarement entendue dans notre sæculum idolâtre actuel. En d’autres termes, il comprend qu’une société bien ordonnée sans Dieu (plus explicitement, sans le Christ qui est Dieu incarné) n’est pas vraiment réalisable. En effet, l’homme sans Dieu n’est rien d’autre qu’un orphelin-victime qui devient facilement la proie des forces sataniques qui rôdent dans le monde à la recherche de quelqu’un à dévorer.
Les diverses utopies impies des pires philosophes sont toutes des systèmes sans issue. Elles séduisent en faisant miroiter l’espoir d’un paradis sur terre toujours inaccessible, mais sans cesse promis. Au nom de la liberté, ces idéologies suppriment la vraie liberté pour produire une prolifération de règles, mais elles ne permettent pas l’épanouissement intégral de l’homme. Nous sommes libres lorsque nous choisissons librement le Bien, le Vrai et le Beau. En revanche, choisir librement ce qui est objectivement mauvais revient à asservir la volonté. C’est un véritable enfer sur terre.
La Marche pour la vie de Québec s’est opposée à cette vague de folie dégradante. Elle a commencé par un rassemblement ayant pour toile de fond le chef-d’œuvre architectural qu’est le Parlement de Québec, et devant la belle fontaine de Tourny. L’endroit rappelait les sources d’eau vive offertes à la femme au puits par notre Seigneur. Nous avons soif de cette eau vive. En fait, la foule hurlante des contre-manifestants tourmentés, à leur manière confuse, réclamait cet élément purificateur et vivifiant comme ceux qui meurent de soif dans un désert de mensonges.
Après avoir assisté à des dizaines et des dizaines de manifestations pro-vie dans de nombreux pays et villes, il m’est apparu évident que cet événement était véritablement unique, en grande partie parce que la ville de Québec est unique. En effet, cette ville est la rampe de lancement spirituelle de l’Amérique du Nord catholique, puisqu’elle est le siège du premier diocèse établi sur le continent.* Le premier évêque de ce diocèse historique, saint François-Xavier de Montmorency-Laval, a été légitimement élevé sur les autels. Sa statue imposante orne la ville comme une sentinelle du Ciel qui nous appelle à revenir à la fidélité à Dieu. Ce n’est pas tout, car la province de Québec (à l’origine la Nouvelle-France), au cours de ses 490 ans d’histoire, a littéralement produit des dizaines de saints, de bienheureux et de vénérables, dont beaucoup ont versé leur sang pour le Christ Jésus.
L’opposition qui nous pressait était typiquement enragée et déséquilibrée dans ses slogans, ses cris incessants et ses battements de tambour infernaux. Si l’on peut se permettre un étrange excès de générosité, nous devrions admettre qu’ils étaient honnêtes d’une manière diabolique. Leur vitriol était parsemé de pancartes outrancières et même d’affichages ouvertement sataniques. Ils ont étalé leurs cartes de tarot sur la table pour que chacun puisse les interpréter. Bien sûr, il y avait les habituels slogans superficiels et usés, tels que Mon corps, mon choix.
La Marche pour la vie a providentiellement eu lieu le premier jour du mois consacré au Sacré-Cœur de Jésus. C’est le cœur qui a souffert pour l’humanité déchue avec un amour brûlant, symbolisé par une flamme jaillissant d’un cœur transpercé par la couronne d’épines.
Debout dans la foule, devant l’estrade destinée aux discours inauguraux, il est rapidement devenu impossible d’entendre clairement à cause de la rage cacophonique des tourmentés. Ils se sont rapprochés de plus en plus, jusqu’à ce que nous nous retrouvions coude à coude avec les partisans de la légalisation du meurtre et de la perversion. Ils battaient des tambours, nous sifflaient dans les oreilles et pointaient des téléobjectifs sur nous comme des armes.
Un homme s’est recroquevillé sur le sol et s’est tordu de façon moqueuse comme un bébé à naître sous le couteau de l’avorteur. Et puis il y avait la pléthore de pancartes obscènes représentant les parties reproductives des femmes, griffonnées de slogans furieux. Certaines de ces pancartes semblaient déifier l’utérus, insultant ainsi la dignité et le mystère de la femme.
Du côté des pro-vie, certains brandissaient des pancartes appelant à la protection des enfants innocents à naître, des infirmes et des malades en phase terminale. Un groupe de la paroisse Saint-Zéphirin portait une magnifique bannière de Notre-Dame, la Mère de Dieu. Cela a suscité une colère particulière, et à juste titre. Dieu n’a-t-il pas prononcé la sentence suivante à l’encontre de l’ancien serpent : « Je mettrai l’inimitié entre toi et la Femme ».
Je me suis demandé ce que l’homme de Mars aurait pensé en voyant ce spectacle étrange de Terriens contrastés. Avec quel camp ET se serait-il senti plus à l’aise ? Quel côté aurait été perçu comme représentant le meilleur de l’humanité ? Il s’agit bien sûr d’une question rhétorique.
Pourtant, le soleil a brillé favorablement sur le rassemblement, comme si Dieu était satisfait de Campagne Québec-Vie, ce qui était indéniablement le cas. La marche s’est ensuite déployée dans les rues comme si elle était guidée par une foule d’anges gardiens, paisiblement et joyeusement, passant devant les badauds et les poteaux de rue décorés de la satanique bannière à six bandes accrochée un peu partout pour marquer le « mois de la Fierté ». Les marcheurs se promènent, se mêlent et discutent, tissant de nouveaux liens entre eux, résolus à défendre leur cause.
L’opposition s’est évaporée, comme le fait le Diable vacillant lorsque le Saint Nom de Dieu est invoqué avec dévotion. Et les pro-vie ont accompli leur journée de travail pour la gloire de Dieu et le salut des âmes.
C’était un résumé plutôt abrégé de ce qui, à mon avis, a été un tournant spirituel. Car il s’agissait de la ville de Québec, que l’on ne peut jamais considérer comme une vieille ville pittoresque comme les autres. L’histoire catholique y est tout simplement trop profonde. Et même s’il existe une amnésie collective québécoise concernant sa gloire spirituelle passée, il n’en demeure pas moins que cette ville est, ou devrait être considérée, comme la pierre de touche du catholicisme en Amérique du Nord. Nous devons nous rallier à la ville de Québec comme à une Jérusalem américaine. La Marche pour la vie était attendue depuis longtemps, mais elle a eu un effet providentiel poignant.
Dans les jours qui ont suivi, j’ai visité les nombreux sanctuaires de l’ancienne province fièrement catholique. Elle est parsemée de tombes des saints, bienheureux et vénérables susmentionnés. Avec chaque décret successif de leur vertu héroïque et de leur pouvoir d’intercession devant le trône de Dieu, ils émergent comme des soldats en ordre de bataille. Avec chaque mort d’un saint catholique, l’Église devient plus forte, et non plus faible. Combien d’autres capitaines de cette lutte bien menée sont à venir ?
Dans la lutte pour protéger la vie humaine et repousser les puissances de la mort, ce n’est pas seulement notre génération actuelle qui s’engage dans la bataille, car elle inclut nécessairement ces hommes et ces femmes à jamais saints, les membres permanents de la Sainte Église catholique. Il est stupéfiant de considérer la gloire de cette ancienne colonie française, conquise par l’Angleterre, mais fidèle à Rome jusqu’à ce que l’infâme Révolution tranquille commence à la priver de sa vitalité.
Mais je refuse de considérer la sainte nation du Québec comme vaincue. Elle est plutôt attachée à la colonne pour être flagellée, en union avec son Seigneur souverain, Jésus-Christ. Sa passion se déploie jusqu’au jour de la résurrection dans la gloire.
Le Père Francis Michael de Rosa est prêtre du diocèse d’Arlington, en Virginie.
*L'archidiocèse de Québec (1674) est certes le premier diocèse créé au nord du Mexique, mais il n'est pas le premier diocèse d'Amérique ou même d'Amérique du Nord, les premiers étant Saint-Domingue, Conception de las Vegas et San Juan de Puerto Rico (1511), suivis de plusieurs autres, notamment celui de l'archidiocèse de Mexico (1530). — A.H.
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