Par Alex Schadenberg (Coalition pour la prévention de l’euthanasie) — Traduit par Campagne Québec-Vie — Photo : Freepik
Les docteurs Harvey Chochinov et Joseph Fins ont rédigé un excellent article, publié dans le Journal of the American Medical Association (JAMA) du 8 octobre et intitulé : Is Medical Assistance in Dying Part of Palliative Care? (L’Aide médicale à mourir fait-elle partie des soins palliatifs ?)
Les auteurs posent en fait la question de savoir si l’Aide médicale à mourir (AMM), mieux connue sous le nom d’euthanasie, fait partie d’un traitement médical et peut donc faire partie des soins palliatifs. Le problème est que dans de nombreuses juridictions où l’euthanasie est légale, elle est déjà considérée comme faisant partie des soins palliatifs.
Les auteurs commencent l’article en déclarant que la plupart des organisations nationales de soins palliatifs, y compris l’Association canadienne de soins palliatifs, estiment que l’AMM ne fait pas partie de la pratique des soins palliatifs. Les auteurs précisent donc que l’objectif de cet article est le suivant :
Déterminer si l’AMM fait partie des soins palliatifs, sur la base des caractéristiques intégrées à la pratique de la médecine.
La première question que se posent les auteurs est de savoir si l’AMM fait partie ou non de la médecine. Les auteurs examinent cette question en se basant sur les quatre canons de la thérapie définis par Thomas et coll. qui sont : la restauration, la proportionnalité des moyens, la parcimonie et la discrétion.
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En ce qui concerne les mesures de restauration, les auteurs concluent :
Il est difficile de concevoir la MAID comme une mesure réparatrice parce que l’acte même rend tout retour impossible.
En ce qui concerne la proportionnalité des moyens, les auteurs concluent :
Il est difficile de considérer la mort comme « bien adaptée » parce que celle-ci annule les moyens alternatifs de traiter la douleur. La mort ne peut être titrée ni testée ; elle ne peut donc pas être considérée comme une thérapie, ce qui signifie que sa recherche se situe en dehors du domaine de la médecine.
En ce qui concerne la parcimonie, les auteurs concluent :
Cette adaptation d’une thérapie à une condition spécifique, en s’appuyant sur des lignes directrices fondées sur des preuves, n’est pas respectée dans le cadre de l’AMM, où la préférence du patient dicte effectivement la pratique. À titre d’exemple, les Canadiens qui cherchent à bénéficier de l’AMM ne sont pas obligés d’essayer d’autres traitements qu’ils jugent inacceptables. Dans ces cas-là, les médecins peuvent être amenés à renoncer à la parcimonie — même si leur jugement clinique les oriente vers d’autres options — pour se plier à la volonté du patient de recevoir l’AMM.
En ce qui concerne la discrétion, les auteurs concluent :
La discrétion « conseille d’être conscient des limites de la connaissance et de la pratique médicales pour guider toutes les décisions de traitement ». Depuis le lancement de l’AMM au Canada, l’admissibilité s’est élargie, s’étendant de personnes dont le décès est raisonnablement prévisible à des personnes qui ne sont pas en train de mourir, mais qui vivent avec un handicap ; la maladie mentale, les enfants et les personnes qui anticipent la perte de leurs capacités mentales sont désormais pris en considération. Bien que certains puissent y voir une affirmation de l’autonomie individuelle, l’éthicien Paul Ramsey nous rappelle que les médecins doivent reconnaître que la fonction de la médecine n’est pas de soulager la condition humaine de la condition humaine.
Les auteurs examinent ensuite la relation patient-médecin et concluent :
Même lorsqu’elle est bien intentionnée, l’AMM sape la relation patient-médecin en violant le principe de non-abandon. Au plus fort de la détresse du patient, l’AMM tronque les soins et élimine la possibilité de guérison. Elle se distingue ainsi de la médecine palliative, qui prend en charge le patient et sa famille en fin de vie avec fidélité et en établissant une relation qui s’étend jusqu’à l’accompagnement du deuil pour les survivants.
Les auteurs présentent ensuite l’AMM, l’espoir et les soins palliatifs et concluent :
Il est impossible de maintenir cette position thérapeutique lors de l’évaluation de l’état de préparation d’un patient à l’AMM. La première (soins palliatifs) implique des soins médicaux holistiques, tandis que la seconde s’oriente vers un paradigme légaliste centré sur la détermination de l’admissibilité à l’AMM.
Les auteurs examinent ensuite l’AMM sous l’angle des considérations politiques et de l’État :
Les arguments politiques séparant l’AMM et les soins palliatifs sont enracinés dans l’idée que les soins palliatifs affirment la vie, considèrent la mort comme un processus normal et s’engagent à « ne pas hâter ni retarder la mort ». Les organisations représentant les soins palliatifs ont résolument affirmé que l’AMM ne relevait pas de leur mandat.
Chochinov et Fins ont fourni d’excellents arguments et prouvé que l’AMM n’est pas un traitement médical et qu’elle ne peut donc pas faire partie des soins palliatifs.
Néanmoins, dans de nombreuses juridictions, y compris au Canada, l’AMM est administrée comme si elle faisait partie des soins palliatifs. L’un des problèmes est que les administrateurs des soins de santé, au sein du gouvernement et au niveau régional, ont mis en œuvre l’euthanasie, qui consiste à tuer un patient sur demande, comme s’il s’agissait d’un traitement médical.
L’objectif des chercheurs médicaux, tels que Chochinov et Fins, doit être de convaincre les administrateurs médicaux que l’AMM ne fait pas partie de la médecine et que, si elle est légale, elle doit être séparée des services qui constituent réellement un traitement médical, tels que les soins palliatifs.