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« Mourir dans l’indignité. J’ai été témoin de la mort médicalement assistée de mon père »

Par Alex Schadenberg (Coalition pour la prévention de l’euthanasie) — Photo : wirestock/Freepik

Le 26 novembre, Christopher Lyon a partagé sur son site un article au sujet de la mort médicalement assistée (euthanasie) de son père. J’ai republié certaines parties de cette histoire. Lyon la commence ainsi :

Mon père a été tué, devant ma famille et moi, par son fournisseur d’aide médicale à mourir (AMM), un médecin, dans une chambre d’hôpital numérotée de Victoria, en Colombie-Britannique, au cours de l’été 2021. Bien qu’il ait été à mi-chemin de la période d’évaluation de 90 jours requise pour les demandes d’aide médicale à mourir de la piste 2 (mort non prévisible), il est rapidement passé de la piste 2 à la piste 1 (mort prévisible), ayant réussi les deux évaluations requises.

Une semaine avant de mourir, il avait emménagé dans un appartement nouvellement rénové et aménagé dans le cadre d’un programme d’aide à la vie autonome. Il disait que la nourriture était bonne et qu’il appréciait le salon de coiffure interne. Deux jours plus tard, il a commencé à refuser la nourriture solide. Deux ou trois jours après, il est tombé, pendant une vague de chaleur qui a surchargé les ambulances et les auxiliaires médicaux locaux. Il a donc été laissé sur le sol de son appartement pendant six ou sept heures avant qu’une ambulance ne puisse l’atteindre car le personnel avait comme politique de « ne pas relever » [les personnes tombées]. Il était furieux. La première fois que ma famille et moi avons eu des nouvelles de son prestataire d’AMM, c’est à ce moment-là, quarante-huit heures avant sa mort. Mon père a indiqué que ses évaluateurs pouvaient contacter la famille à tout moment, on ne sait donc pas pourquoi nous n’avons pas été prévenus auparavant. On nous a simplement dit que mon père avait fait l’objet d’un suivi et que nous devions prendre des billets d’avion maintenant si nous voulions assister à son décès dans deux jours.

Le prestataire m’a dit qu’il avait fait l’objet d’un suivi parce que a) il avait commencé à refuser la nourriture solide (mais pas, comme nous l’avons découvert, les liquides caloriques), et b) que son taux élevé de globules blancs indiquait une infection qu’il ne voulait pas faire investiguer immédiatement. Apparemment, ces choix fugitifs ont servi de base pour qualifier sa mort de fixe et prévisible. Pourtant, on ne m’a jamais expliqué en quoi l’un ou l’autre de ces choix était irrémédiable ou constituait une mort imminente ou une perte de capacité.

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Son père a fait plusieurs chutes

Ma famille avait profité de ses hospitalisations pour convaincre les services sociaux d’intervenir et d’accélérer son placement dans une résidence assistée ou un logement sûr et salubre. Il était très réticent à déménager depuis plusieurs années et avait une longue histoire d’expression suicidaire qui culminait pendant les périodes de changement. Les services sociaux ont fait des merveilles et ont réussi à lui trouver un placement d’urgence dans une résidence assistée locale.

Il semblait souvent anxieux à propos de son déménagement dans une résidence assistée et était obsédé par la réduction de soixante-dix pour cent de son faible revenu, principalement tiré du Régime de pensions du Canada (1400 $/mois, si je me souviens bien), qu’il lui en coûterait pour y résider. Il n’a jamais été très habile avec l’argent et il lui restait à peine de quoi payer sa facture de téléphone mobile et ses frais de subsistance. L’aide de la famille était toujours disponible. Nous avons proposé de compléter ses dépenses et avons prévu de lui acheter un scooter de mobilité avant qu’il ne soit tué.

Lors de l’un de nos appels hebdomadaires, après son avant-dernière hospitalisation, il a prétendu qu’il était alité et immobile et qu’il avait donc besoin de l’AMM. Pourtant, il était assis sur une chaise, se levait pour aller aux toilettes et était capable de se déplacer dans la pièce par ses propres moyens. Lorsque nous le confrontions à ce sujet et à d’autres affirmations et incohérences, il devenait furieux et menaçait de se tuer ou, sans expliquer sa décision, exigeait que nous ne la remettions pas en question.

Son père était suicidaire

Dans les mois qui ont précédé sa demande d’AMM, papa était extrêmement suicidaire. Il citait comme sources d’inspiration les suicides de personnes comme Robin Williams et Ernest Hemingway -- des hommes qui « savaient tout simplement quand il était temps de partir ». Il a dit qu’il cherchait en ligne des moyens de se tuer, comme la famine. D’autres fois, il disait des choses comme « de la cendre à la cendre » [prière anglicane récitée aux enterrements] et « nous sommes de la poussière dans le vent », comme dans les crises précédentes. Lorsqu’il a dit cela, j’ai fait en sorte que la ligne d’assistance au suicide de la Colombie-Britannique lui téléphone, et il a eu une conversation avec eux au cours de laquelle il a mentionné ces décès et a affirmé qu’il n’était pas déprimé.

... Sa tendance suicidaire s’est accentuée lors de bouleversements involontaires dans sa vie, tels que la perte de son entreprise, une séparation conjugale et des déménagements qui ont eu un impact négatif sur tous les membres de ma famille. Dans mes jeunes années, il a menacé ma mère de se suicider, événement dans lequel je suis intervenu physiquement. Il a également déclaré avoir choisi son prestataire d’AMM, une femme, en raison de l’attrait qu’elle exerçait sur lui, et l’a déclarée seconde épouse ou deuxième amour, ce qui suggère à nouveau sa vision romantique de l’auto-annihilation.

Dans ses moments les plus sombres, il a utilisé le suicide pour manipuler les membres de sa famille. Dans les semaines précédant l’AMM, il a déclaré que lorsque la famille lui demandait des explications ou le critiquait pour ses incohérences ou sa malhonnêteté apparente, cela lui donnait « encore plus envie de le faire ». Il a menacé de se suicider si l’AMM lui était refusée. Alors qu’il était à l’hôpital, un membre de la famille l’a interrogé sur ses idées, et il a répondu d’un air revêche : « Je vais trouver un peu de corde ». Il a renoncé à ses menaces lorsqu’un membre de sa famille lui a expliqué très patiemment à quel point un suicide sous leur surveillance serait un fardeau et un problème pour le personnel hospitalier qui fait de son mieux pour s’occuper de lui. Je crois que le personnel de l’hôpital savait qu’il était suicidaire.

L’évaluation en vue de l’AMM

Pendant la période de ses chutes et de ses hospitalisations, le projet de loi C-7 a été adopté et l’AMM pour la voie 2, « mort naturelle non raisonnablement prévisible », est devenue nouvellement disponible. Lorsqu’il m’a dit pour la première fois qu’il étudiait l’AMM, quelques semaines avant de faire sa demande, il a dit qu’un « médecin » à qui il avait parlé à l’hôpital « m’avait dit que je devrais l’avoir ». Je ne l’ai pas cru en raison de sa tendance à l’écoute sélective et au report des responsabilités. Pourtant, j’ai maintenant des doutes, après avoir appris que l’île de Vancouver abrite certains des évaluateurs et fournisseurs d’AMM les plus prolifiques et idéologiques du Canada, favorisant les idées vivisectionnelles d’autonomie amputée (sic) et d’élargissement de l’admissibilité, ainsi que le taux de mort assistée médicalement le plus élevé du monde. Cela donne envie de réfléchir.

Sa période d’évaluation de 90 jours se serait terminée le jour de l’anniversaire de sa mère décédée, et il a pris cela comme un « signe » qu’il devait poursuivre avec l’AMM. Cela a fait écho à sa réaction ultérieure lorsqu’il a obtenu que sa période d’évaluation soit été divisée par deux et que la fin de celle-ci tombe le premier jour où le prestataire qu’il avait choisi était disponible, et aussi le jour de l’anniversaire d’un autre membre de la famille pour lequel il avait souvent exprimé un ressentiment latent.

Il voulait s’assurer que l’évaluation de l’AMM de son père était solide

Quelques jours après sa demande, j’ai recherché et contacté un psychiatre d’AMM de premier plan et lui ai fait part de mes préoccupations. On m’a conseillé de dresser une liste des connaissances et des inquiétudes de ma famille concernant les maladies mentales, le suicide et les problèmes de personnalité, et d’insister pour la transmettre aux évaluateurs afin d’organiser une évaluation psychiatrique. Ne pouvant obtenir les coordonnées des évaluateurs, ma famille et moi avons rassemblé ces informations. Je les ai envoyées au coordinateur d’AMM local qui a dit qu’il les transmettrait aux évaluateurs.

Lorsqu’enfin j’ai eu des nouvelles du prestataire avant [la date de l’AMM], je lui ai demandé si elle avait reçu notre liste de préoccupations et j’ai reçu une réponse évasive. Le prestataire semblait vouloir raccrocher rapidement le téléphone et semblait se trouver dans un endroit très fréquenté, comme un couloir d’hôpital, car je pouvais entendre des voix en arrière-plan. Je n’ai donc eu que quelques secondes pour décrire l’histoire complexe de mon père. Le prestataire semblait également considérer les antécédents suicidaires de mon père et le diagnostic antérieur de dépression comme des nouvelles. Au cours de cet appel, j’ai également relayé, comme l’avaient fait les autres membres de ma famille, que j’avais parlé à un psychiatre de l’AMM qui m’avait conseillé d’insister pour obtenir une évaluation psychiatrique. En apprenant cela, le fournisseur a accepté à contrecœur d’essayer d’obtenir une évaluation psychiatrique de dernière minute, mais il n’était pas certain de pouvoir trouver un psychiatre si près de la mort prévue.

Un psychiatre a été trouvé. Le prestataire m’a carrément dit, avant l’évaluation de mon père, que le psychiatre ne ferait que « donner son accord » et « la couvrir », mais elle a aussi dit qu’il ne serait pas admissible à l’AMM si une maladie mentale était trouvée. Cependant, la « découverte » d’une maladie mentale ne serait qu’une maladie concomitante et non un diagnostic unique, étant donné les justifications de l’approbation et de l’évolution de la situation, donc ce commentaire n’a pas de sens pour moi. Malgré le fait que j’aie indiqué que papa avait déjà été diagnostiqué, le prestataire a déclaré qu’elle ne pensait pas qu’il était déprimé. J’ai été très troublé par la présomption du prestataire quant au résultat de l’évaluation psychiatrique, ce qui m’a laissé entendre que l’évaluation manquerait d’indépendance et de rigueur.

Les jours précédant la mort de son père

Dans ses derniers jours, sous surveillance médicale, papa a bu du jus, du café et du vin sans aucune réserve. Il se faisait livrer des repas à l’hôpital, qu’il picorait à peine et dont il n’aimait pas la nourriture. Il buvait du vin le soir et le matin avant sa mort. Il n’était peut-être pas sobre pour son consentement final.

Lorsque ma famille est arrivée, mon père ou un membre du personnel de la clinique nous a informés qu’il avait une « permission spéciale » de boire de l’alcool. Le soir avant sa mort, il a bu du vin (environ ½ bouteille) après plusieurs jours sans nourriture solide. À ce moment-là, ma famille a réussi à le convaincre de retarder sa mort pour que nous puissions passer plus de temps avec lui. Le lendemain matin, cependant, il semblait avoir oublié cette conversation. Il semblait confus et pensait que ce jour-là pouvait aussi être celui d’une autre évaluation. J’ai averti le prestataire à ce sujet, mais elle s’est contentée de dire qu’elle allait « commencer par le début » et a disparu dans sa chambre, seule. Le prestataire a ensuite annulé une réunion avec la famille en début d’après-midi. Mon père a bu du café et du vin ce matin-là et a dormi de midi à 14 heures environ. Je pense que ce sommeil pourrait avoir été provoqué par l’alcool.

Il avait également semblé confus au cours des semaines précédentes, pendant sa période d’évaluation. Il ne semblait pas pouvoir faire la différence entre les évaluateurs et les autres cliniciens qui le voyaient. Il est possible qu’il ait pris des analgésiques (opioïdes), car je me souviens que le personnel infirmier lui en avait proposé, et [il en a] peut-être même accepté avant sa mort. Lors de ses premiers séjours à l’hôpital, il avait exigé des doses plus élevées afin de pouvoir les « sentir », ce qui me laisse penser qu’il recherchait peut-être davantage leur effet narcotique que le soulagement de la douleur.

Le jour de sa mort était l’anniversaire d’un membre de la famille (pas le mien), et il s’est d’abord excusé d’avoir oublié, puis il en a ensuite décidé autrement et a déclaré que c’était son « cadeau spécial ». Ce membre de la famille a été témoin du décès et a considéré son choix comme un acte final de malveillance ou de ressentiment. À ma grande détresse, le prestataire était également au courant de l’anniversaire et a fait des commentaires à cet effet. En privé, j’avais essayé de dissuader mon père et de lui expliquer pourquoi c’était mal, mais il n’avait réagi que de manière agressive et dédaigneuse.

Aucune évaluation des capacités n’a été faite immédiatement avant le consentement final.

La mort de son père

Le prestataire devait arriver entre 15 h 30 et 16 h, mais elle s’est présentée en retard, à 16 h 5 environ, et a dit, sans ménagement et avec une grande joie, « J’ai entendu dire que c’était l’anniversaire de quelqu’un ! » avant de procéder à « l’obtention du consentement final » pour le suicide-homicide. Mon père a déclaré son consentement avec un belliqueux : « Sortez-moi de cet enfer ! » et le prestataire est devenu la Mort.

La Mort a essayé un bras, puis l’autre, pour trouver un site d’injection, avant de s’installer sur son côté droit, et de s’asseoir, toute chaude, à côté de moi sur le petit canapé lisse de clinique. La Mort a ensuite sorti sa longue parade empoisonnée de seringues toutes préparées, extraites dans l’ordre d’une boîte à outils en plastique -- les produits chimiques, tout comme la boîte, étant réutilisés pour quelque chose que leurs fabricants n’avaient pas prévu. Déplacé quelque part sur la lente rivière blanche de propofol qui s’écoulait en lui à partir de trois ou quatre seringues-bouteilles de lait, papa a disparu. Son visage chaud a blanchi et sa tête a oscillé là où on l’a laissé, appuyé sur le lit. Il a mis vingt minutes à mourir.

Les derniers mots que la Mort m’a adressés, peu de temps avant de partir, étaient une demande de ne pas évoquer les préoccupations ou les problèmes que j’avais soulevés.

Papa avait 77 ans.

Il essaye de découvrir pourquoi son père avait été approuvé pour être tué par AMM

L’exécuteur testamentaire -- le plus proche parent de mon père -- et moi-même avons par la suite soumis une demande d’accès à ses dossiers d’AMM. Le responsable des dossiers nous a refusé l’accès à tous les dossiers, à l’exception du rapport d’évaluation psychiatrique, car il n’était pas dans l’intérêt du patient décédé de nous les communiquer, et il a joint un imprimé de la législation pertinente. Cependant, nous avons découvert que le rapport d’évaluation psychiatrique se limite uniquement à exclure la dépression, et aucune autre maladie mentale. Le rapport affirme surtout le contraire de ses antécédents médicaux, à savoir qu’il n’est pas suicidaire, qu’il boit occasionnellement et qu’il ne fume pas (malgré le fait qu’il ait consommé du tabac toute sa vie). Il indique également qu’il a vécu dans une résidence assistée pendant environ un mois, bien qu’il n’y soit resté que cinq jours avant de tomber et d’être hospitalisé -- une semaine avant l’AMM et la mort. De manière appropriée, aucune maladie clinique chronique (principalement l’arthrite, le diabète, la claudication) n’est répertoriée comme étant en phase terminale. Pourtant, le rapport ne mentionne aucune des affections prétendument terminales invoquées par le prestataire pour justifier l’accélération [du cas de mon père] sur la voie de l’AMM ; il se contente d’indiquer qu’il l’a été. Les informations contenues dans ce rapport sont donc largement erronées et inexactes, ce qui indique à mes yeux un échec flagrant de cette dernière garantie.

Certaines des informations que le prestataire et le psychiatre ont écartées ou mal interprétées auraient probablement été disponibles dans le dossier médical normal de son médecin généraliste. J’avais transmis ces informations au coordinateur régional de l’AMM et j’en avais parlé au prestataire avant que mon père ne soit tué. Comme l’autorité sanitaire de l’île de Vancouver n’a pas publié l’intégralité de son dossier d’AMM, je ne sais pas quelles informations ont été consultées ou utilisées pour approuver sa mort.

J’ai protesté dans un message texte (la plupart des contacts avec le prestataire se faisaient par texto), déclarant que j’étais stupéfait que rien n’ait été trouvé, et réitérant mes préoccupations. J’ai demandé si quelqu’un dans le processus avait essayé de sauver sa vie. En réponse, le prestataire m’a dit que diligence raisonnable avait été faite, et de ne plus la contacter, car il s’agissait de son numéro privé et qu’il était inapproprié d’en parler. J’ai interprété cela comme une menace implicite de me voir interdire l’accès à l’hôpital si je continuais à réclamer des réponses. Le prestataire avait pourtant pris contact avec moi sur son téléphone personnel, qui était le seul moyen qu’elle utilisait pour nous contacter, ma famille et moi.

Merci Christopher Lyon d’avoir partagé l’histoire de la mort de votre père. Il n’est pas facile de partager une telle histoire, mais il est important que les Canadiens sachent à quel point l’évaluation et la mort de votre père ont été traitées de façon cavalière par le « prestataire », le psychiatre et le système médical.



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