Mgr Crepaldi évoque le coronavirus, dénonce le panthéisme, le mondialisme, l’abandon de souveraineté, la culture de mort
Mgr Giampaolo Crepaldi évêque de Trieste en Italie, bénissant la ville avec le Très Saint Sacrement, le 1er mars 2020.
Par Jeanne Smits (Le blog de Jeanne Smits) ― Image : Capture d’écran de la vidéo d’Il Piccolo
La morale devra changer pour être de nouveau fondée sur autre chose qu’elle-même, et la société devra retrouver le sens de Dieu et de la religion : telle est l’appel à la vérité et au réel lancé par Mgr Giancarlo Crepaldi, évêque de Trieste, à propos de la crise du coronavirus.
Dans un passionnant article publié en exclusivité il y a quelques minutes par Marco Tosatti sur son blog Stilum curiae, Mgr Crepaldi souligne comment le COVID-19 met à mal les grandes erreurs du temps : le naturalisme qui enseigne la bonté de la nature et notre devoir de « connexion » avec elle, le panthéisme, mais aussi le rejet de la doctrine sociale de l’Eglise et son principe de subsidiarité nié par le mondialisme supranational.
Et de rappeler aussi que le mot latin « Salus » signifie certes santé, mais aussi salut, et que le salut n’est pas forcément la santé ici-bas comme le savaient bien les martyrs.
Il est vrai que Mgr Crepaldi fait partie des évêques qui sont sortis de leurs cathédrales pour bénir leurs villes avec le Saint Sacrement alors que les fidèles ne peuvent plus venir à la messe.
Le texte est revigorant. Je vous en propose ci-desssous, avec l’aimable autorisation de Marco Tosatti, ma traduction. — J.S.
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Plus rien ne sera comme avant
L’épidémie liée à la propagation de la « COVID-19 » a un fort impact sur de nombreux aspects de la coexistence entre les hommes et pour cette raison, elle nécessite également une analyse du point de vue de la Doctrine Sociale de l’Église. La contagion est avant tout un événement sanitaire et cela suffit à relie directement à l’objectif du bien commun. La santé en fait certainement partie. En même temps, elle pose le problème de la relation entre l’homme et la nature et nous invite à surmonter le naturalisme qui est répandu aujourd’hui et je rappelle que, en l’absence de gouvernement de la part de l’homme, la nature produit aussi des catastrophes et qu’une nature uniquement bonne et d’emblée exempte de contamination n’existe pas.
Elle pose ensuite le problème de la participation au bien commun et de la solidarité, en nous invitant à aborder, sur la base du principe de subsidiarité, les différentes contributions que les acteurs politiques et sociaux peuvent apporter à la solution de ce grave problème et à la reconstruction de la normalité, une fois l’épidémie derrière nous. Il est devenu évident que ces contributions doivent être articulées entre elles, convergentes et coordonnées. Le financement des soins de santé, un problème que le coronavirus met très clairement en évidence, est un problème moral central dans la poursuite du bien commun. Il est urgent de réfléchir tant aux objectifs du système de santé qu’à sa gestion et à l’utilisation des ressources, car l’examen du passé récent laisse constater une réduction significative du financement des établissements de soins de santé. L’épidémie menace en effet la fonctionnalité des filières productives et économiques, et leur blocage, s’il se prolonge, entraînera des faillites, du chômage, de la pauvreté, des difficultés et des conflits sociaux. Le monde du travail sera soumis à de grands bouleversements, de nouvelles formes de soutien et de solidarité seront nécessaires et des choix drastiques devront être faits. La question économique renvoie à celle du crédit et à la question monétaire et, par conséquent, aux relations de l’Italie avec l’Union européenne dont dépendent dans notre pays les décisions finales dans ces deux domaines. Cela soulève à nouveau la question de la souveraineté nationale et de la mondialisation, faisant ressortir la nécessité de réexaminer la mondialisation comprise comme une machine systémique mondialiste, qui peut aussi être très vulnérable précisément en raison de son interrelation interne rigide et artificielle, de sorte que, lorsqu’un point névralgique est touché, elle provoque des dommages systémiques globaux difficiles à corriger. Lorsque les niveaux sociaux inférieurs sont soustraits à la souveraineté, tous seront emportés. D’autre part, le coronavirus a également mis en évidence les « fermetures » des États, incapables de coopérer réellement même s’ils sont membres des institutions supranationales auxquelles ils appartiennent. Enfin, l’épidémie a posé le problème de la relation du bien commun avec la religion catholique et de la relation entre l’État et l’Église. La suspension des messes et la fermeture des églises ne sont que quelques aspects de ce problème.
Lire la suitePas de souveraineté nationale sans souveraineté individuelle
Les nationalistes de gauche (p.ex. les péquistes, option nationale, etc.) et de droite (p.ex. les Mathieu Bock-Côté, Richard Martineau, etc.) clament haut et fort pour la souveraineté, c'est-à-dire l'émancipation du Québec qui doit, pour s'épanouir, être libéré de l'influence (néfaste, dit-on) du Canada anglais.
Ce qu'ils semblent oublier, c'est que la vraie souveraineté nationale passe nécessairement par la souveraineté individuelle de chaque citoyen. C'est-à-dire: si un peuple est composé de gens qui n'ont pas de maîtrise de soi, comment espère-t-il être souverain par rapport aux autres peuples?
Je m'explique : Disons que par un coup génial de marketing le gouvernement péquiste réussirait, dans l'année qui vient, à proposer et à remporter un référendum. Il y aurait peut-être un genre de « souveraineté » factice, mais en réalité, le Québec, en dette comme il est, sa situation démographique comme elle l'est, serait obligé de courber l'échine non à un gouvernement canadien redevable devant l'électorat et quand même assez transparent, mais, ce qui est encore pire, à une nébuleuse oligarchie internationale composée de banques faisant des prêts aux pays quitte à ce que ces derniers obéissent à leurs diktats.
Quelques exemples de diktats: 1) Vous allez apprendre à vos enfants l'anglais dès la maternelle, car cette langue est plus rentable, et donc plus financièrement intéressante pour nous. 2) Vous allez suspendre la loi 101, car vous faites peur aux investisseurs, etc., etc.
Et le bon peuple, qui n'a pas la vraie souveraineté sur lui-même, ne pourra pas refuser ces "ordres" de la part des banques et des multinationales, car lui ne peut se passer de son pain et de ses jeux. Seuls des gens véritablement souverains, véritablement « maîtres d'eux-mêmes, » peuvent sacrifier le court terme (une jouissance immédiate) pour le long terme (l'émancipation et l'épanouissement d'un peuple, d'une culture.)
On voit ici que le Québec « indépendant », sans un redressement moral de sa population, sans une démarche de souveraineté individuelle se retrouverait, au lendemain d'un référendum gagné, non pas « libéré de ses chaînes », mais davantage soumis aux lois d'institutions et de personnes qui lui sont étrangères.
Bref, avant d'être « maître chez soi » il faut être maître de soi-même.
Mathieu Bock-Côté : la souveraineté avant la vie ?
