Témoignage de l'expérience eugénique, ressentie par les médecins et les parents


« Les équipes médicales posent le diagnostic, envisagent le pronostic. Puis soit on le surveille soit on le soigne soit on le tue.Ces trois verbes dans la même phrase paraissent agressants; toutefois, ils résument une certaine réalité du diagnostic anténatal. Réalité à laquelle on peut ajouter tous les qualificatifs que l’on souhaite – violente, impensable —, mais qui correspond à l’histoire de ces couples venant consulter et qui seront conduits à se séparer de leur bébé lors d’une intervention“Ne nous leurrons pas : la traque de la malformation fœtale, de la maladie congénitale, ne conduit en pratique à rien d’autre qu’à la mort d’un bébé. Éradiquer le handicap, éliminer ce qui ne saurait être vu, est un des axes principaux d’un centre de médecine fœtale.Les médecins doivent et peuvent vous donner un bébé parfait, en bonne santé. Cela rappelle étrangement les services après-vente assurés par certains commerces. Si le produit ne convient pas, on peut le rapporter, l’éliminer, ou le détruire. » (p.17)“Les équipes de médecine fœtale fonctionnent en permanence dans l’ambivalence la plus grande, entre la suppression du bébé malade ou malformé et le désir de le soigner. Rappelons à ce propos que, par définition, la médecine est anti-eugénique, puisque son objectif premier est de soigner; elle permet à des gens de continuer à vivre alors que sans elle ils seraient morts. Ce ne sont pas les équipes médicales qui ont inventé le désir du bébé parfait, bien qu’avec les techniques sophistiquées dont elles disposent, elles peuvent être portées à le croire; cependant, elles doivent surtout entretenir cette illusion à la fois pour elles-mêmes et pour leurs patients. D’où cette obsession de la traque de la malformation : elle ne peut passer à travers les mailles de leur filet, par crainte du procès certes, mais aussi dans la hantise de ne pas avoir fait reconnaître leurs extraordinaires compétences. Et puis, la naissance d’un bébé malformé reste pour eux du domaine de l’échec et génère une culpabilité immense. « Je ne comprends pas comment j’ai pu passer à côté, j’avais tout bien vu à l’écho. » Ils sont atteints à la fois dans leur corps et dans leur psychisme. » (p.18-19)« La mère confie son bébé au monde médical. Certaines femmes diront plus tard, après avoir tout vécu : « Avec tous leurs examens, ils m’ont dépossédée de ma grossesse. » Là est bien la difficulté pour les médecins : ne pas prendre possession, ne pas s’emparer, ne pas priver, au sens de frustrer, de spolier. Si court que soit le temps qu’il leur reste à partager avec ce bébé-là, ces parents en ont besoin. Sans respect de cet espace nécessaire à la compréhension, l’équipe devient maltraitante; » (p.19-20)« Le ciel s’assombrit, le diagnostic n’est pas bon, et encore moins le pronostic. On ne parle plus de date présumée d’accouchement mais – l’intolérable se profile, l’inacceptable se révèle – de date d’interruption de grossesse, précisément d’interruption médicale de grossesse, termes qui ne disent qu’en demi-teinte la réalité du geste. À aucun moment n’apparaît dans les mots la notion de mort : on ne dit pas qu’il s’agit de tuer un bébé. On tait la vérité, on la passe sous silence. Il faut aller chercher derrière les termes la violence à laquelle les parents vont être confrontés.(…)En effet, que peuvent espérer ces parents? Vivre avec ‘un bébé livré éternellement aux services hospitaliers »; ‘un bébé qui va mal ‘. ‘Nous, on n’en voulait pas’, assurent-ils.(…)‘Je ne pensais pas à la mort de mon bébé, je tricotais de la layette pour lui. Dès le début de la grossesse, je parlais beaucoup à mon ventre, j’ai eu l’impression de lui avoir menti, de l’avoir trahi. C’était pas de sa mort que je lui parlais mais de sa vie avec nous. On l’attendait, puis après on ne l’attendait plus. On était ailleurs, on parlait d’obsèques, du cimetière. Des projets de vie annulés. Il n’a pas eu d’existence, il n’a pas dormi dans son lit. Je ne l’ai pas tenu dans mes bras vivant. Mon geste, je ne l’accepte pas. Même si c’était le mieux je m’en veux. Les médecins ne savaient pas le soigner, peut-être que dans dix ans ils sauront.’ (p.23-24)‘En effet, pour les parents, il s’agit bien d’une mise à mort active de leur enfant. Je me souviens de cette femme qui avait demandé de manière quelque peu brutale, au médecin de partager avec elle et son conjoint la violence du geste foeticide en disant au gynécologue au moment de l’acte : ‘Alors là, vous allez tuer mon bébé.’ Ou cette autre femme, parlant de son ressenti, au sujet de ce qu’on appelle, en y mettant les formes, l’euthanasie fœtale (mort douce et sans souffrance : surtout que, dans certaines maternités, il est encore pratiqué des intracardiaques pour tuer les fœtus in utero. Quand on connaît la violence de cette mort, on peut se demander s’il est vraiment question de vouloir épargner aux bébés les souffrances liées au déclenchement de l’accouchement!...) : ‘J’ai l’impression que j’ai tué mon bébé, je revis le geste foeticide, ça resurgit, j’aurais voulu être là sans être là, mais le ventre c’est moi… Peut-être que mon bébé s’est aperçu qu’ils le tuaient, c’est comme un assassinat commandité. Le soir, quand je rentre, je reste avec ma vie, je ne peux pas occulter ce geste. Ce n’est pas la décision, c’est l’après. Est-ce qu’il s’est endormi avant l’arrêt cardiaque? Est-ce qu’il a souffert? Tout est point d’interrogation dans cette histoire. » Avec ces mots, avec son ressenti, elle reconstruit le traumatisme lié à l’acte foeticide. Toutes et tous le vivent de la même manière ‘Prendre cette décision, c’est l’horreur, choisir de donner la mort à son enfant, c’est quand même le tuer. Choisir. Décider. ON lui a donné la vie et maintenant on lui donne la mort; même s’il n’est pas viable avec sa malformation, c’est quand même le tuer dans le ventre de sa mère », disait un père.’ (p.28-29)‘Malraux disait : ‘La mort transforme une vie en destin.’ Cette pensée témoigne du ressenti des parents que j’ai pu rencontrer. ‘Je ne l’oublierai jamais, il restera ce bébé, c’est quand même un enfant, il a sa place. ‘ Ce père disait que la mort de son fils se rappelait à lui par ‘cette place, cette chaise haute qui restera vide, cette place à table qui ne sera jamais occupée, mais il sera toujours là dans ma tête et il sera toujours notre premier enfant ‘». (p.45)
La nouvelle technologie Prena Test : pour un eugénisme sans faille...
Sur le site de la Nef du mois d'octobre 2012:
Nom de commercialisation : PrenaTest. Autorisé depuis la fin de l’été au Lichtenstein ainsi qu’en Allemagne, Autriche et Suisse, ce test de dernière génération qui nécessite une simple prise de sang « s’adresse aux femmes enceintes à la 12e semaine de grossesse et au-delà, courant un risque accru de trisomie 21 pour l’enfant en gestation » selon le communiqué publié par son fabricant Lifecodexx (1). Dans ces pays, le test est déjà proposé aux mères chez lesquelles le dépistage classique du premier trimestre associant une échographie et un dosage sanguin des marqueurs sériques a identifié un risque supérieur à un certain seuil (1 sur 250). Pour le confirmer, il fallait jusqu’ici recourir à un diagnostic invasif, soit une choriocentèse (biopsie du placenta), soit une amniocentèse (ponction de liquide amniotique) selon la date de la grossesse. En repérant une trisomie 21 fœtale avec une sensibilité proche de 100 %, le PrenaTest peut dorénavant se substituer à ces examens. Comment ce que tout le monde encense comme une « prouesse technique » a-t-il été possible ?
Depuis quelques années, les chercheurs savaient isoler de courts fragments de l’ADN fœtal circulant dans le sang maternel sans toutefois parvenir à recomposer les chromosomes d’origine. C’est la mise au point récente de séquenceurs à haut débit qui leur permet aujourd’hui d’assembler les pièces du puzzle et de détecter d’éventuelles anomalies sur les chromosomes fœtaux reconstitués. Une rapide enquête sur le site Internet de Lifecodexx permet de comprendre le scénario qui a permis le développement de ce test. Cette start-up, dont le siège est en Allemagne, est une filiale du groupe GATC Biotech, lui aussi allemand, dont le laboratoire de séquençage génétique est actuellement leader en Europe. Associée à Sequenom, l’une des firmes américaines les plus en pointe dans ce domaine dont elle exploite d’ailleurs une licence, Lifecodexx affiche l’ambition de révolutionner la pratique de la médecine prénatale par le développement de « nouveaux tests moléculaires innovants ». (...)
Pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, nous sommes capables, à partir d’un simple prélèvement sanguin chez la mère, de porter un diagnostic précis sur le génome de l’enfant avant qu’il ne vienne au monde. Le perfectionnement incessant des outils diagnostiques conjugué à la discrimination génétique expose dès lors les enfants à naître à un « contrôle qualité » jamais vu, avec pour conséquence la disqualification dans un proche avenir de tous ceux qui ne satisferont pas nos grilles normatives. Devant l’Académie pontificale pour la Vie, Benoît XVI s’est élevé dès 2007 contre cet eugénisme biomédical sans précédent : « Dans les pays développés grandit l’intérêt pour la recherche biotechnologique la plus pointue, pour instaurer des méthodes d’eugénisme, subtiles et étendues, jusqu’à la recherche obsessionnelle de l’enfant parfait, avec la diffusion […] de diverses formes de diagnostics visant à en assurer la sélection. Une nouvelle vague d’eugénisme discriminatoire est approuvée au nom d’un soi-disant bien-être des individus » (3). Le pape a une nouvelle fois fait part de sa grande préoccupation dans sa dernière encyclique, en dénonçant l’instauration d’« une planification eugénique systématique des naissances » (4). (...)
Des bioéthiciens qui perdent le nord...
Dans les années 1990, un étudiant en bioéthique à l'Université de Montréal apprenait que l'avortement étant une question réglée, tout le cours porterait sur l'euthanasie, ou plutôt l'acceptation de l'euthanasie. Dans la classe, la majorité des étudiants sont de futurs médecins... Mais cette question semble dépassée, maintenant, il s'agit plutôt de l'acceptation de l'eugénisme. Sur le blog de Jeanne Smits du 21 août 2012 nous est présenté un "bioéthicien" écouté, dont l'article eugéniste a paru dans le... Sélection du Reader Digest!:
(Julian Savulescu)
Le Pr Julian Savulescu a choisi le populaire Reader’s Digest pour lancer sa petite bombe bioéthique : il vient d’écrire que la création de bébés sur mesure pourrait bien finir par être considérée comme une « obligation morale » dans la mesure où cela permettrait d’obtenir des « enfants éthiquement meilleurs ». Et pour commencer, assure l’universitaire britannique spécialiste d’éthique pratique, il faudrait activement œuvrer afin que les parents puissent accéder au tri embryonnaire pour éliminer les défauts de personnalité chez leurs enfants, puisque ceux-ci auraient alors moins de chance de se faire du mal ou de faire du mal aux autres.Le rédacteur-en-chef du Journal of Medical Ethics estime que nous sommes au cœur d’une révolution génétique où le dépistage embryonnaire, aujourd’hui limité à certaines affections très précises, devrait être accepté de manière large. Richard Alleyne, du Daily Telegraph, rapporte que Savulescu recommande le tri négatif et positif : négatif pour éliminer les gènes indésirables, positif pour conserver les embryons porteurs de gènes associés à une bonne personnalité. Car, affirme le chercheur, la science permet de savoir aujourd’hui que les gènes ont un poids significatif sur la personnalité et certains marqueurs génétiques peuvent annoncer la probabilité que l’enfant aura certains traits de personnalité.« N’est-ce pas que le fait d’assurer que votre enfant aura la meilleure, ou à tout le moins un bon espoir d’une vie excellente, c’est de la paternité responsable ? », écrit le Pr Savulesco. « Dès lors que la sélection génétique cherche à faire ressortir un trait qui peut clairement bénéficier l’individu et la société, nous devrions laisser le choix au parents. Agir autrement consisterait à emprisonner ceux qui viendront après nous par la force de notre aversion et de notre irrationalité. Mieux : s’il s’agit d’éliminer des défauts de personnalité comme l’alcoolisme potentiel, la pyschopathie, la disposition à la violence, on pourrait soutenir que les gens ont une obligation morale de choisir des enfants éthiquement meilleurs. (…) Si nous avons le pouvoir d’intervenir sur la nature de notre progéniture – plutôt que de la confier à la loterie naturelle – alors nous en avons le devoir. »Savulescu appelle cela le « dessein rationnel » et assure que nous l’acceptons déjà à travers le tri génétique qui permet d’éliminer les embryons porteurs de trisomie ou de gènes prédisposant au cancer du sein » : pas d’inconvénient, donc, à aller plus loin.Ce faisant le chercheur – qui n’a rien de marginal, puisque dans le domaine bioéthique il est parfaitement reconnu par ses pairs et qu'il a une chaire à Oxford – met le doigt sur une réalité : l’eugénisme existe déjà et, à travers les exemples qu’il donne, on a pu voir qu’elle ne suscite pas de protestations massives, ce qui montre selon lui que ces procédures sont déjà acceptées par l’opinion publique.
Le choix de l'avenir: acheter son enfant par catalogue?
Si l'on en croit certains "bioéthiciens", c'est vers cette piste que nous nous dirigeons. Un article paru sur le blog de Jeanne Smits du 9 août 2012:
Une télévision néo-zélandaise a interviewé un bioéthicien en tournée donner une série de conférences sur les nouvelles possibilités de tri génétique des embryons et des enfants à naître. Le Pr Robert Klitzman, fondateur du Columbia University Centre for Bioethics, pose de nombreuses questions sur les nouveaux moyens de dépister de nombreuses caractéristiques de l'enfant à naître – défauts génétiques, prédisposition au cancer ou à Alzheimer, traits physiques – qui deviennent de plus en plus étendus et de plus en plus aisés à mettre en œuvre, et aussi moins onéreux.
La question se posera de plus en plus, à des « millions de parents », dit-il, de savoir s'ils veulent garder un enfant dont on saura dès la gestation qu'il est atteint d'une maladie quelconque, par exemple une maladie dont souffre l'un des parents, confronté dès lors à une question difficile : s'il décide d'éliminer l'enfant, qu'est-il en train de dire sur lui-même et sur sa propre vie ?
Le tri préimplantatoire prend lui aussi de l'ampleur, comme nous le savons déjà en France, où la recherche sur la lutte contre la myopathie consiste largement à favoriser l'élimination d'embryons atteints pour n'implanter que des enfants sains…
Avec les milliers de nouvelles conditions dépistables, on va évidemment vers un tri accru, et même, probablement, vers une commercialisation accrue de ces procédés : les riches, demande le Pr Klitzman, seront-ils avantagés par la possibilité de « mieux » choisir leur enfant que les pauvres ? (...)
Dans son interview à la TVNZ, le Pr Klitzman ne fait que plaider pour le débat, n'apportant pas de réponses et encore moins de jugements sur le plan moral : interrogé sur le fait de savoir où il fallait fixer la limite, il a répondu qu'il s'agit d'« engager ces discussions et de penser au type d'homme que nous voulons ».
Sa réponse dit plusieurs choses : un, il n'y a pas de règle morale préétablie dictant une conduite conforme à la dignité de l'homme ; deux, l'éthique que l'on devrait s'imposer sur ce plan ne résultera que du débat et d'un choix pris collectivement (à la majorité politique ou à la faveur des avis des bioéthiciens, sans doute) ; trois, même ce débat essentiellement relativiste n'a pas lieu aujourd'hui, puisque Klitzman ne fait que plaider pour qu'il ait lieu.
L'eugénisme, un droit fondamental en Europe?
Sur le site de genethique.org du 17 mai 2012:
Dans son édition du 19 mai 2012, L’homme nouveau fait le point sur les enjeux d’une affaire actuellement pendante devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) (cf Synthèses de presse Gènéthique du 5/04/2012, du 23/04/2012 et du 9/05/2012).
L’affaire Kruzmane contre Lettonie "a commencé avec l’histoire d’une jeune mère lettone, Anita Kruzmane, en procès contre son médecin qui (…) aurait (…) manqué à l’obligation de lui prescrire un test de dépistage de la trisomie." Ayant accouché d’une petite fille trisomique, celle-ci s’est tournée vers la CEDH. Elle considère que ce défaut de prescription est source d’un préjudice : celui de n’avoir pas pu avorter.
Pour Thierry de la Villejégu, directeur de la Fondation Lejeune, "le simple fait que la Cour ait accueilli cette demande sans la rejeter d’emblée souligne bien que le danger de (…) [la] reconnaissance [de l’eugénisme, comme droit fondamental] est réel. En effet, la Cour "aurait pu rejeter la plainte pour non-respect des critères de recevabilité ou pour abus de droit. "
Même si "la date de rendu du jugement n’est pas connue ", Thierry de la Villejégu insiste sur la nécessité de se mobiliser car "les juges peuvent étudier le cas à tout moment." C’est pourquoi la Fondation Lejeune ainsi que "d’autres associations européennes de défense des personnes handicapés", réunies sous le label stopeugenicsnow, s’attachent à sensibiliser l’opinion publique sur cette affaire, en invitant à signer une déclaration en ligne, rappelant que " l’avortement n’est pas (…) un droit de l’homme inscrit dans la législation européenne. " Le directeur de la Fondation Lejeune insiste : " si l’eugénisme devenait un droit fondamental, une pression certaine pèserait sur la liberté de conscience. Qui demain s’opposera à un droit fondamental ? "
" Les enjeux de ce jugement sont [donc] immenses, d’autant que la trisomie n’est qu’une parmi beaucoup d’autres maladies que nous sommes ou serons bientôt en mesure de dépister. "
Une mère s'inquiète de la pratique de l'eugénisme à Laval
Un article paru sur le site du courrierlaval.com du 14 avril 2012:
À compter du 16 avril, le Programme québécois de dépistage prénatal de la trisomie 21 sera mis en place à Laval. Mère d’une adolescente trisomique, Anik Larose craint les dérives de ce programme.
D’emblée, elle assure qu’elle n’est pas contre l’avortement, mais elle regrette qu’il s’agisse pratiquement de la seule option offerte aux femmes qui apprennent que leur bébé est porteur de la trisomie 21. «Je ne juge pas celles qui font ce choix, mais j’ai des craintes lorsqu’un gouvernement endosse une pratique que je juge eugénique», soutient cette mère de trois enfants.
«Je ne crois pas trop au consentement éclairé parce que le corps médical ne donne pas l’heure totalement juste. Il occulte les aspects positifs de la vie avec un enfant trisomique», affirme celle qui travaille à l’Association du Québec pour l’intégration sociale.
Ce qui dérange le plus les gens par rapport à la trisomie 21 est le fait qu’elle affecte le développement intellectuel, croit Mme Larose. «J’ai vérifié auprès de l’Association québécoise des personnes de petite taille et on n’incite pas à avorter les parents qui apprennent lors de l’échographie que leur enfant sera de petite taille. Ces enfants aussi feront face à des problèmes de santé», déclare-t-elle.
Selon elle, les médecins perçoivent les enfants trisomiques comme des bébés qui n’auraient pas dû naître. Celui qui lui a annoncé que sa fille Marie était porteuse de trisomie lui a plus tard confié qu’il aurait préféré devoir lui dire que son bébé était mort.
«Ce n’est pas vrai que c’est une vie qui ne vaut pas la peine, insiste Anik Larose. Est-ce qu’on peut porter un jugement sur la qualité d’une vie?»
Leucémie
C’est encore avec beaucoup d’émotions qu’elle revient sur la période où Marie a été hospitalisée à l’âge de deux ans pour guérir une leucémie. «Ç’a été plus difficile que l’annonce du diagnostic. Nous avons eu peur de la perdre. Nous ne voulons pas la perdre, c’est quelqu’un de précieux», raconte-t-elle, les yeux baignés de larmes.
«Est-ce qu’on peut porter un jugement sur la qualité d’une vie?» -
«Ma sœur est courageuse et persévérante», souligne Jean-Pascal, 13 ans, qui a appris récemment que sa sœur aînée a dû se battre contre le cancer.
Fierté
«Marie est très autonome. Elle est à son affaire, elle a une mémoire visuelle incroyable, énumère sa mère. Elle continue de faire des progrès au niveau de son langage, elle prend confiance en elle et ose davantage s’exprimer.»
Anik Larose parle avec autant d’admiration des succès de sa fille, qui aura bientôt 17 ans, que de ceux de ses deux autres enfants qui excellent à l’école. Après avoir été intégrée dans une classe régulière à l’école Des Ormeaux, la jeune fille fréquente maintenant l’école secondaire Leblanc.
Les personnes trisomiques n’ont pas seulement un chromosome de plus, fait remarquer Mme Larose. Comme tous les enfants, ils héritent des traits de caractère de leurs parents et sont influencés par leur milieu familial.
«L’aspect social est la force des personnes trisomiques. Elles sont sociales, affectueuses et aiment les fêtes. Dans le cas de Marie, au niveau de la sphère sociale, les tests ne montrent aucune déficience intellectuelle», décrit Anik Larose.
Mme Larose redoute que les services pour les personnes trisomiques soient réduits si elles sont moins nombreuses dans la population. Elle craint également une plus grande marginalisation, alors qu’elle estime que les enfants qui ont côtoyé sa fille ont pu développer une plus grande ouverture face aux différences.
La cour européenne des droits de l'homme doit se prononcer: l'eugénisme est-il le nouveau "droit" de l'homme "parfait"?
Sur le site de gènéthique.org du 23 avril 2012, cette nouvelle:
Prochainement, la Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH) de Strasbourg va devoir se prononcer dans le cadre de l'affaire Kruzmane contre Lettonie (Cf Synthèse de presse Gènéthique du 05/04/12). Dans cette affaire, "la Cour Européenne des Droits de l’Homme a été saisie pour statuer sur un droit fondamental à recourir à 'la procédure de dépistage et d’élimination prénatale des enfants malades ou handicapés' ". Il s'agit de savoir si l'eugénisme "pourrait être considéré comme un [droit de l'homme]".
Face à ce grave enjeu, "les associations et familles de personnes trisomiques à travers toute l’Europe en appellent au soutien et à la mobilisation de tous les citoyens européens". Plusieurs organisations européennes déjà co-signataires (espagnole, irlandaise, allemande, française (Fondation Jérôme Lejeune), polonaise, croate, lettone, ukrainienne...etc) se mobilisent pour la première fois, ensemble, contre cette éventuelle décision qui viendrait "non seulement aggraver violemment la stigmatisation des personnes handicapées, mais aussi généraliser et ériger en droit de l’homme le processus de sélection et d’élimination des personnes jugées 'non conformes' ".
Ces associations, réunies sous le label "stopeugenicsnow" émettent une déclaration en ligne afin de demander "à la Cour de réaffirmer le principe de l’interdiction de l’eugénisme ainsi que l’obligation des Etats de protéger la vie de toute personne, y compris celle des personnes handicapées avant leur naissance".
Les signataires de cette déclaration, associations ou particuliers, rappellent que "c’est l’élimination systématique des enfants trisomiques en Europe qui constitue une vraie violation des droits de l’homme, et non que certains d’entre eux aient échappé à cette sélection."
Une pétition pour arrêter l'eugénisme en Europe
Sur le site de Zenit.org du 20 avril 2012, on trouve cette information:
Europe : arrêter l'eugénisme, maintenant
L'enjeu de l'affaire Kruzmane contre Lettonie
ROME, jeudi 19 avril 2012 (ZENIT.org) – C’est la première fois que des organisations en faveur de la trisomie 21 agissent ensemble au niveau européen pour une telle affaire : comment l’eugénisme pourrait-il être considéré comme un « droit humain » ?
La Fondation Jérôme Lejeune se mobilise aux côtés d’autres associations et familles européennes de personnes porteuses de trisomie 21 pour dénoncer une possiblereconnaissance de l’eugénisme des enfants à naître, handicapés ou malades, comme un droit fondamental en Europe par la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH). Tel est l’enjeu de l’affaire Kruzmane contre Lettonie en cours de jugement à Strasbourg.
Les associations européennes d’ores et déjà co-signataires de la déclaration en ligne sur le site www.stopeugenicsnow.org font part de leur action commune de mobilisation et sensibilisation sur ce grave sujet à travers ce communiqué en ligne.
Outre les citoyens européens appelés à signer individuellement la déclaration, d’autres associations et organisations européennes prolongeront la liste des organisations signataires pour apporter leur soutien à cette mobilisation dans les jours à venir.
La cour européenne des droits de l'homme doit statuer sur l'avortement et l'eugénisme
L'agence de presse Zenit.org du 4 avril 2012 nous apporte cette information:
ROME, mercredi 4 avril 2012 (ZENIT.org) – « La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) est actuellement saisie d’un nombre sans précédent d’affaires relatives à l’avortement. Parce que les principes jurisprudentiels adoptés par cette Cour s’imposent aux 47 Etats membres, les prochains mois seront décisifs pour le respect de la vie et de la dignité humaine. L’ECLJ, qui intervient comme tierce partie dans plusieurs de ces affaires[1], souhaite attirer l’attention sur ces affaires très importantes », explique le directeur du Centre européen pour le droit et la justice (ECLJ), Grégor Puppinck dans cet article (cf. aussi Zenit du 3 avril 2012).
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Parmi les affaires que la Cour européenne doit actuellement juger, citons le cas d’une mère polonaise qui se plaint des difficultés rencontrées pour obtenir que sa fille mineure puisse avorter[2] ; il y a aussi le cas d’une femme décédée durant une grossesse en raison (prétendument) de l’objection de conscience exercée par les médecins[3]. Dans une autre affaire, une femme devenue stérile suite à un avortement se plaint de ne pas avoir été correctement informée des risques encourus[4]. Dans deux autres cas soumis à la Cour, des femmes ayant donné naissance à des enfants handicapés se plaignent de ne pas avoir été en mesure d’avorter[5]. Enfin, sur un sujet proche, la Cour est également saisie d’une affaire mettant en cause l’interdiction, par le législateur italien, de diagnostic préimplantatoire[6].
L’ECLJ arendu ses observations le 2 avril dans le cas d’Anita KRŪZMANE contre la Lettonie dans lequel une mère se plaint de ne pas avoir été en mesure d’avorter sa fille trisomique. Elle prétend en particulier que son médecin aurait manqué à une obligation de lui prescrire un test de dépistage de la trisomie. Invoquant un lien de causalité directe entre l’absence de test de dépistage et la naissance de sa fille trisomique, la requérante prétend avoir subi une atteinte dans le droit au respect de sa vie privée, laquelle vie privée comprendrait –d’après la requérante- le droit de décider d’avorter. En résumé, il s’agit de savoir si l’eugénisme est devenu un droit de l’homme.
Cette revendication –faire de l’eugénisme un droit de l’homme- peut paraître folle, mais pas au point de choquer d’emblée la Cour, sans quoi elle l’aurait rejetée pour non respect des critères de recevabilité ou pour abus de droit car, selon la Convention, « nul ne peut utiliser les droits garantis par la Convention dans le but de rechercher l'abolition ou la limitation de ces mêmes droits » (art. 17). Il ne fait pas de doute que l’affaire KRŪZMANE et les autres affaires actuellement pendantes sont utilisées de façon stratégique pour essayer de faire avancer les « droits » à l’avortement et à l’eugénisme. L’eugénisme, à la suite de l’avortement, est en voie de normalisation sociale : de plus en plus rares sont ceux qui perçoivent encore l’inhumanité de ces pratiques. De fait, la postmodernité engendre l’inhumanité de la posthumanité dont l’eugénisme est l’un des instruments du projet d’autodépassement de l’humanité.
Pour aider la Cour face au danger et à la complexité de ces affaires, l’ECLJ a essayé dans ses observations de montrer la situation et la stigmatisation des personnes handicapées et de rappeler les véritables fondements et exigences des droits de l’homme et de l’éthique biomédicale à l’égard du respect de la vie humaine, de la finalité de la médecine et de l’interdiction de l’eugénisme.
Ces prochains mois, la Cour européenne aura la responsabilité de définir, pour les 47 Etats membres, une grande partie du cadre juridique de l’avortement et de questions proches telles que l’eugénisme (DPI et DPN) et l’objection de conscience. Ce cadre juridique sera revêtu du prestige moral de la Cour. Ce pouvoir est considérable car la Cour est conduite à élaborer ces règles jurisprudentielles largement en dehors du cadre de la Convention, car l’avortement et l’eugénisme sont contraires à la Convention, telle qu’elle a été pensée, rédigée et voulue par ses auteurs. Il ne fait aucun doute qu’en 1950, au sortir de la seconde guerre mondiale, les rédacteurs de la Convention condamnaient ces pratiques comme inhumaines, et qu’il était pour eux inconcevable que l’on puisse un jour prétendre en faire des droits de l’homme.
Face à une société qui tend à nier la valeur et l’humanité de la vie prénatale pour mieux la supprimer ou l’exploiter, la Cour a interprété la Convention européenne des droits de l’homme de façon à pouvoir tolérer la pratique de l’avortement tout en écartant explicitement l’existence d’un prétendu droit à l’avortement[7]. Alors que certaines autorités « bioéthiques » parlent de légaliser « l’avortement postnatal »[8], la Cour manquerait à sa mission en laissant l’enfant à naître sans aucune protection.
Selon l’ECLJ, il appartient à la Cour, qui a reçu des Etats la mission de garantir le respect des droits fondamentaux de « toute personne », de poser des bornes à cette pratique, s’agissant notamment de l’avortement tardif (après le seuil de viabilité) et de l’avortement sélectif selon les caractéristiques de l’enfant, notamment génétiques (selon le sexe et l’état de santé de l’enfant). En ce sens, dans ses observations, l’ECLJ a montré que le droit international et la Convention européenne protègent la vie humaine prénatale et ne créent pas de droit à l’avortement, mais qu’à l’inverse, l'Etat a l'obligation positive de protéger la vie. Ainsi, même lorsqu’un Etat permet l’avortement, il reste cependant soumis, à l’égard de la Convention, à l’obligation positive de protéger la vie et de ménager les droits et intérêts concurrents. L’Etat doit ainsi notamment éviter la stigmatisation des personnes handicapées et de leur famille, protéger la liberté des parents de ne pas avorter, rendre effective l’interdiction de l’eugénisme et des discriminations génétiques, respecter la finalité thérapeutique du diagnostic prénatal, respecter le droit à l’objection de conscience du personnel médical, etc.
Ces prochainsmois seront décisifs pour le respect de la vie et de la dignité humaine. La Cour va devoir aussi se prononcer sur des affaires concernant l’euthanasie[9] et les « mères porteuses »[10]. La Cour européenne des droits de l’homme a ses racines dans la culture moderne et humaniste ; ces requêtes l’invitent à rompre ces amarres et à embrasser l’illusion de la postmodernité, et avec elle l’inhumanité. Le risque est fatal, car une « Cour des droits de l’homme » qui reconnaîtrait et protègerait l’avortement, l’eugénisme, l’euthanasie et la pratique des mères porteuses serait devenue inhumaine.
Le Centre européen pour le droit et la justice est une organisation non-gouvernementale internationale dédiée à la promotion et à la protection des droits de l'homme en Europe et dans le monde. L'ECLJ est titulaire du statut consultatif spécial auprès des Nations-Unies/ECOSOC depuis 2007. L'ECLJ agit dans les domaines juridiques, législatifs et culturels. L’ECLJ défend en particulier la protection des libertés religieuses, de la vie et de la dignité de la personne auprès de la Cour européenne des droits de l'homme et au moyen des autres mécanismes offertes par l'Organisation des Nations Unies, le Conseil de l'Europe, le Parlement européen, et l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). L'ECLJ fonde son action sur « les valeurs spirituelles et morales qui sont le patrimoine commun des peuples [européens] et qui sont à l'origine des principes de liberté individuelle, de liberté politique et de prééminence du droit, sur lesquels se fonde toute démocratie véritable » (Préambule de la Statut du Conseil de l'Europe).
European Centre for Law and Justice
4, Quai Koch
67000 Strasbourg, France
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[1] L’ECLJ intervient dans les affaires P. et S. c. Pologne, n° 57375/08, Kruzmane c. Lettonie, n° 33011/08, et Costa et Pavan c. Italie, n° 54270/10 et est intervenu précédemment devant la Grande Chambre, dans les affaires A., B. et C. c. Irlande, et S. H. c. Autriche
[2] P. et S. c. Pologne, n° 57375/08
[3] Z c. Pologne n° 46132/08
[4] Csoma c. Roumanie, n° 8759/05
[5] Kruzmane c. Lettonie, n° 33011/08, Ozçakmak c. Turquie, n° 24573/08
[6] Costa et Pavan c. Italie, n° 54270/10
[7] Dans l’arrêt de Grande Chambre A. B et C. c. Irlande.
[8] Alberto GIUBILINI et Francesca MINERVA, “After-birth abortion: why should the baby live?”, in Journal of Medical Ethics, doi:10.1136/medethics-2011-100411.
[9] Affaires Koch c. Allemagne, n° 497 et Gross c. Suisse, n° 67810/10.
[10] Affaires Mennesson et autre c. France, n°65192/11 et Labassee et autres c. France, n° 65941/11
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L'eugénisme sans honte
L'agence de presse Zenit relate le sort des enfants trisomiques. De plus en plus, au Québec comme ailleurs, la personne handicapée devient inacceptable:
"ROME, Dimanche 18 septembre 2011 (ZENIT.org) –Dans un article intitulé « L’élimination de l’imparfait », L’Osservatore Romano dénonce – sous la plume du néonatologue Carlo Bellieni – la disparition autour de nous d’enfants marqués par des maladies génétiques. Censurés par les médias, cachés par leurs parents mais surtout avortés, ces enfants sont victimes d’une société incapable d’accepter la différence. Autre conséquence de ce phénomène : la recherche de thérapies est ralentie."