Champlain a-t-il trahi le roi ?
Samuel de Champlain capitulant avec la ville de Québec devant l'amiral Kirke.
Par l’historien Jean-Claude Dupuis, Ph. D. — Photo : mcq.org/Wikimedia Commons
La mode est à la « déconstruction » des héros nationaux. La désinformation historique alimente une sorte d’autoracisme en nous apprenant à détester nos ancêtres. Nous sommes les « méchants ». Les autres sont les « bons ».
Récemment, les historiens Michel de Waele (Université Laval) et Paul Cohen (Université de Toronto) ont attaqué la réputation de Samuel de Champlain en prétendant qu’il avait trahi le roi de France, en 1629. Cette année-là, les Anglais ont conquis Québec et Port-Royal. Mais la France pouvait légitimement récupérer ses colonies, car elles avaient été prises après la fin des hostilités en Europe. L’ambassadeur français à Londres demanda à Champlain de rédiger un mémoire pour l’éclairer sur la géographie de l’Amérique du Nord. Le mémoire aurait insisté sur la récupération du Canada, mais en abandonnant l’Acadie. Selon de Waele et Cohen, le fondateur de Québec plaçait les intérêts mercantiles de la Compagnie des Cent-Associés au-dessus des intérêts territoriaux de la France. Notons que les Cent-Associés avaient le monopole du commerce au Canada, mais pas en Acadie. Champlain aurait donc « trahi » le roi d’une certaine manière. Et c’est pourquoi il perdit, entre 1630 et 1632, la pension que lui versait la cour.
Admettons que ce n’est pas très glorieux pour la nation canadienne-française que d’avoir un traître comme « père fondateur ».
Mais les deux historiens iconoclastes se sont fait ramasser par Éric Thierry (Université de Paris IV), qui vient de publier les œuvres complètes de Samuel de Champlain. Dans une remarquable conférence, prononcée au Rendez-vous d’histoire de Québec 2019, Thierry a démontré que de Waele et Cohen avaient commis une erreur en travaillant sur une version tronquée du mémoire de Champlain, celle qui se trouve aux Archives publiques du Canada. La version intégrale, déposée à la Bibliothèque nationale de France, prouve que Champlain a bel et bien réclamé l’Acadie.
« Non, dit-il, Samuel de Champlain n’a pas trahi le roi de France, en 1629 ! »
Sa conclusion a soulevé les applaudissements de l’auditoire. Les gens semblent en avoir ras le bol du discours d’autodestruction de la patrie.
Éric Thierry constate que Champlain est effectivement tombé en disgrâce, entre 1630 et 1632. Mais il explique ce fait par un motif qui rehausse le prestige du fondateur de Québec.
Le conseil royal de Louis XIII se divisait en deux tendances. Le « parti des politiques », dirigé par le cardinal de Richelieu, prônait une alliance tactique entre la France et les États protestants pour contrer la puissance de l’Espagne. Le « parti des dévots », conduit par la reine-mère, Marie de Médicis, et le garde des Sceaux, Michel de Marillac, souhaitait plutôt que la France s’allie avec l’Espagne catholique pour combattre le protestantisme allemand et l’islamisme turc. Les politiques privilégiaient les intérêts de l’État, et les dévots ceux de l’Église.
Richelieu a évincé Marillac lors de la « Journée des Dupes » (10 novembre 1630). Or Champlain était lié au parti des dévots. À la fin de sa vie, il était devenu très pieux sous l’influence de son épouse, Hélène Boullé. Il fut une victime indirecte de la Journée des Dupes. Guillaume de Caen, un marchand huguenot qui voulait s’emparer du commerce des fourrures au Canada, l’avait systématiquement dénigré à la cour. Mais Champlain est revenu en grâce avec l’aide du Père Joseph, l’éminence grise de Richelieu. Le Père Joseph comptait sur Champlain pour amener des missionnaires capucins en Nouvelle-France.
En définitive, les savantes recherches d’Éric Thierry confirment l’image traditionnelle de Samuel de Champlain : celle d’un grand colonisateur animé par l’esprit d’évangélisation.
https://www.ledevoir.com/societe/le-devoir-de-philo-histoire/524683/samuel-de-champlain-et-les-autochtones-construire-aujourd-hui-sur-un-reve-inexistant
Nationalisme ou racisme ?
Par l’historien Jean-Claude Dupuis, Ph. D. — Photo : Jeangagnon/Wikimedia Commons
La gestion du phénomène migratoire est le problème politique le plus préoccupant qui se pose actuellement aux sociétés occidentales. Le débat devient vite émotif. À gauche, on lance à tort et à travers des accusations de « racisme ». À droite, on sombre dans l’islamophobie primaire.
L’historien québécois Michel Brunet (1917-1985) faisait une distinction qui aide à comprendre la dynamique, souvent complexe, des rapports interethniques. Il appliquait sa grille d’analyse à la rivalité qui oppose les deux nationalités qui habitent la vallée du Saint-Laurent depuis la Conquête de 1760 : les « Canadiens » et les « Canadians », pour reprendre son langage. Mais nous pourrions facilement l’appliquer à d’autres types de tensions interethniques.
Selon Brunet, une même personne peut envisager son rapport avec l’autre ethnie d’une manière variable, selon qu’il situe ce rapport sur le plan collectif/collectif, collectif/individuel, individuel/collectif ou individuel/individuel.
Illustrons le raisonnement du professeur Brunet par le cas d’un jeune étudiant nationaliste que j’ai connu à l’Université de Montréal au début des années 1980. À première vue, il pouvait sembler plein de contradictions. Mais son attitude était en réalité cohérente à la lumière de la grille d’analyse de Michel Brunet.
Sur le plan collectif/collectif, ce jeune homme était un ardent nationaliste canadien-français. Il était en faveur de l’indépendance du Québec et de la Loi 101. À ses yeux, la minorité anglo-québécoise devait être « remise à sa place ». Le Québec était la patrie exclusive des descendants des colons français du XVIIe siècle. Les autres groupes ethniques pouvaient être tolérés, mais ils ne devaient pas exercer le pouvoir, que ce soit sur le plan politique, économique ou culturel.
Lire la suiteBonne Saint-Jean, bonne fête des Canadiens Français
Baptème de Jésus dans le Jourdain par Jean le Baptiste.
Billet de blogue d'Augustin Hamilton (Campagne Québec-Vie) — Photo : Pierre Poschadel/Wikimedia Commons
Le 24 juin, jour de la fête de la Nativité de Saint Jean-Baptiste, souvenons-nous de ce grand saint, précurseur du Christ que le Pape saint Pie X nous donna comme modèle et comme patron en 1908, d'après Vers demain :
Depuis 1624, saint Joseph est le patron du Canada. Cependant, les Canadiens français ont un patron spécial, saint Jean-Baptiste. En effet, le 10 mai 1908, le pape Pie X déclarait: « Nous établissons, nous constituons et nous proclamons, saint Jean-Baptiste patron spécial auprès de Dieu des fidèles franco-canadiens, tant de ceux qui sont au Canada que ceux qui vivent sur une terre étrangère. »
Souvenons-nous également que notre nation était autrefois un modèle tant dans ses familles nombreuses que par ses nombreux missionnaires.
Puissent les Canadiens Français avoir le même courage que leur saint patron, qui alla dire à Hérode qu'il n'avait pas le droit de prendre la femme de son frère. Puissent-ils avoir la même ardeur que le Baptiste à répandre le royaume du Christ, lui qui l'avait annoncé.
Saint Jean-Baptiste, priez pour nous.
La mission d’un peuple
Par l’historien Jean-Claude Dupuis, Ph. D.
À l’approche de la Saint-Jean-Baptiste, fête patronale des Canadiens français, il serait bon de lire ou de relire le sermon que Mgr Louis-Adolphe Paquet prononça, le 23 juin 1902, sur « La vocation de la race française en Amérique ».
Mgr Louis-Adolphe Paquet (1859-1942) enseignait à l’Université Laval. Il était surnommé « notre théologien national ». On le consultait fréquemment sur l’aspect religieux des grandes questions politiques de son temps. Après la Révolution tranquille, Mgr Paquet est devenu un symbole de la « grande noirceur » parce qu’il s’était opposé au suffrage féminin, à l’école obligatoire et à l’industrialisation du Québec. Mais si l’on dépassait le stade de l’invective anachronique pour étudier son argumentation, on découvrirait autre chose. Mgr Paquet défendait la dignité de la femme, l’instruction du peuple et le progrès économique, mais dans une vision catholique plutôt que libérale. Son nationalisme était ardent, mais subordonné à l’humanisme chrétien.
Selon Mgr Paquet, les nations ont, à l’instar des individus, une vocation spécifique. La mission providentielle de notre peuple est de propager la foi catholique et l’esprit français en Amérique du Nord :
« Nous ne sommes pas seulement, une race civilisée, nous sommes les pionniers de la civilisation ; nous ne sommes pas seulement un peuple religieux, nous sommes des messagers de l’idée religieuse […] Notre mission est moins de manier des capitaux que de remuer des idées ; elle consiste moins à allumer le feu des usines qu’à entretenir et à faire rayonner au loin le foyer lumineux de la religion et de la pensée. »
Lire la suiteQuand Mathieu Bock-Côté m’exaspère
Mathieu Bock-Côté.
Par l’historien Jean-Claude Dupuis, Ph. D. — Photo : Asclepias/Wikimedia Commons
Soyons positifs. Mathieu Bock-Côté (MBC) est presque le seul journaliste québécois qui ne souffre pas de paralysie politiquement correcte. Il dit des vérités. Ses réflexions nous changent des âneries conformistes du Devoir et de Radio-Canada.
Soyons réalistes. MBC m’exaspère parce qu’il se rattache à la « droite molle », qui conforte l’idéologie dominante. La gauche n’a rien à craindre des critiques polies de ce genre de conservateur modéré.
MBC déplore la chute du nombre de baptêmes au Québec. « Si les Québécois, écrit-il, deviennent absolument étrangers au catholicisme, même à la manière d’une tradition culturelle, ne risquent-ils pas de devenir tout simplement étrangers à eux-mêmes ? » (Journal de Montréal, 13 mars 2019)
MBC est agnostique, mais il défend la tradition catholique par nationalisme. Cela conduit à une impasse. Son catholicisme sociologique d’arrière-garde ne saurait constituer un fondement identitaire pour le Québec contemporain.
Soyons clairs. Si la foi catholique est fausse, les Québécois doivent s’en débarrasser, car on ne peut pas vivre dans le mensonge. Si elle est vraie, elle ne disparaîtra jamais et les Québécois doivent y revenir au plus tôt s’ils ne veulent pas, quant à eux, disparaître.
Lire la suiteRobert Rumilly : L'infiltration gauchiste au Canada français
Billet de blogue d’Augustin Hamilton (Campagne Québec-Vie) — Photos : Andy Langager/Flickr et Etsy
Robert Rumilly, né le 23 octobre 1897 à Fort-de-France en Martinique et mort le 8 mars 1983 à Montréal, est un historien québécois, ami de Duplessis et notamment célèbre pour son œuvre colossale : Histoire de la province de Québec (en 41 volumes).
Dans son livre « L’infiltration gauchiste au Canada français », Robert Rumilly dénonce les réseaux gauchistes qui ont préparé la Révolution tranquille, ruinant ainsi l’essor des Canadiens français.
Le livre est disponible sur le site internet Etsy.