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Macron demande aux législateurs français d'« inscrire » la « liberté » d’avorter dans la Constitution


Emmanuel Macron.

Par Jeanne Smits — Traduit par Campagne Québec-Vie — Photo : Twitter

10 mars 2023, Paris (LifeSiteNews) — Emmanuel Macron, le président français sans enfant, veut que la « liberté d'avorter » soit inscrite dans la Constitution et l'a déclaré lors d'une cérémonie nationale d'hommage à Gisèle Halimi, une figure de proue du mouvement pro-avortement, mercredi.

Macron, qui promeut également la légalisation de l'euthanasie en France, s'est engagé à ce que son gouvernement présente un projet de loi à cette fin dans les prochains mois, ce qui reviendrait à accélérer les initiatives parlementaires actuelles et à leur donner le poids supplémentaire de son soutien présidentiel.

À ce jour, l'Assemblée nationale française a approuvé la constitutionnalisation du « droit » à l'avortement et, début février, le Sénat a modifié le texte initialement présenté par les députés en remplaçant le mot « droit » par le mot « liberté », obtenant ainsi, contre toute attente, une majorité de voix favorables alors que tout le monde s'attendait à ce que l'initiative soit rejetée.

Venant des parlementaires, la proposition de révision de la Constitution aurait dû être approuvée par référendum. En tant que loi présentée par l'exécutif, la révision constitutionnelle promue par Macron sera beaucoup plus facile à réaliser, ne nécessitant qu'une majorité des trois cinquièmes lors d'un vote conjoint de l'Assemblée nationale et du Sénat. Compte tenu de la formulation choisie par Macron (« liberté » d'avorter par opposition au « droit » d'accéder à l'avortement), le risque d'un vote en faveur de son projet est élevé.

Avec son intrusion largement inattendue dans le débat sur l'avortement, Macron apparaît de plus en plus comme le chef d'État le plus « pro-mort » de l'histoire de France. Même les révolutionnaires sanguinaires tels que Robespierre et Carnot sous la « Terreur » n'ont jamais atteint son niveau de mépris pour la vie humaine innocente.

Certes, au cours des années tragiques qui ont suivi la Révolution de 1789, plusieurs centaines de milliers d' « ennemis de la liberté » ont été guillotinés, fusillés, noyés, brûlés ou écorchés — principalement lors du génocide vendéen — mais depuis la dépénalisation de l'avortement en 1975, quelque 200 000 enfants à naître ont été légalement tués chaque année dans le ventre de leur mère.

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Ces chiffres sont passés récemment à plus de 220 000 avortements par an, grâce à l'allongement récent du délai légal pour l'avortement volontaire jusqu'à 14 semaines de gestation, à la suppression de toutes les conditions restantes et au remboursement intégral de tous les coûts par l'assurance maladie publique. Cela semble indiquer qu'il n'a jamais été aussi facile d'obtenir une « interruption volontaire de grossesse », comme on l'appelle en France, d'autant plus que plus de 75 % des avortements sont désormais chimiques plutôt que chirurgicaux.

Même du point de vue de l'avorteur, et compte tenu de la situation actuelle, il semble inutile de faire de la liberté d'avorter un principe constitutionnel. Les pro-vie n'ont pratiquement aucune chance de progresser sur la scène politique française et le débat sur l'avortement est présenté comme ayant été presque unanimement tranché en faveur du « droit » à l'avortement. Alors pourquoi ce sentiment d'urgence que l'on insuffle au débat, avec le doublement des revendications féministes par le président de la République ?

Il est clair que le renversement de l'arrêt Roe v. Wade aux États-Unis a joué un rôle majeur dans la fuite en avant à laquelle (presque) tout le monde tente de participer. Le « droit » à l'avortement est présenté comme attaqué. Plus profondément, le succès des Américains dans leurs batailles pour la vie devant la Cour suprême semble avoir mis en colère les libéraux, les progressistes et les féministes, les amenant à chercher à rendre coup pour coup.

Macron a fait cette annonce au « Palais de justice » de Paris, qui abrite les cours d'appel et la Cour de cassation, à l'occasion de la Journée internationale de la femme, en rendant hommage à l'avocate et femme politique socialiste Gisèle Halimi (1927-2020), qui a joué un rôle de premier plan dans le mouvement anticolonialiste. Elle a été l'une des signataires, en 1971, du Manifeste des 343 femmes qui ont reconnu avoir avorté clandestinement afin d'obtenir la légalisation de ce qui était à l'époque un délit.

En 1972, elle a été l'avocate d'une mineure qui avait avorté clandestinement, prétendument après avoir été violée, lors du « procès de Bobigny » qui a abouti à son acquittement et a joué un rôle-clé dans le débat politique qui s'en est suivi. Halimi, qui a créé avec son mentor Simone de Beauvoir le mouvement « Choisir » en France, a joué un rôle déterminant dans l'exploitation du procès de Bobigny afin d'obtenir le soutien des médias et des hommes politiques en faveur de la légalisation de l'avortement.

Mercredi soir, Macron a publié sur Twitter une vidéo de sa déclaration, accompagnée de sous-titres, dont voici la transcription :

« Les droits des femmes sont toujours une conquête fragile. Gisèle Halimi, par ses mots, avait fait changer la loi. Je veux aujourd'hui que la force de ce message nous aide à changer notre Constitution afin d’y graver la liberté des femmes à recourir à l’interruption volontaire de grossesse. Pour assurer solennellement que rien ne pourra entraver ou défaire ce qui sera ainsi irréversible. Pour adresser aussi un message universel de solidarité à toutes les femmes qui voient aujourd'hui cette liberté bafouée. Aussi, les avancées issues des débats parlementaires, à l'initiative de l'Assemblée nationale, puis éclairées par le Sénat, permettront, je le souhaite, d'inscrire dans notre texte fondamental cette liberté, dans le cadre du projet de loi portant révision de notre Constitution qui sera préparé dans les prochains mois. Non, nous ne voulons plus jamais de procès de Bobigny. »

Les constitutionnalistes — certains libéraux et beaucoup pro-avortement — ont souligné l'inopportunité d'utiliser la loi fondamentale de l'État français pour affirmer la liberté d'accès à une procédure individuelle et particulière alors que les constitutions visent à organiser la structure politique, le bien public et les droits fondamentaux de tous les citoyens d'une nation souveraine.

Les groupes pro-vie et les quelques politiciens qui sont prêts à défendre leur cause ont exprimé leur inquiétude quant à l'objection de conscience des médecins et du personnel médical qui seront confrontés — si Macron obtient ce qu’il veut — à une « liberté » constitutionnelle de la part des femmes demandant un avortement, au lieu d'une procédure qui est garantie contre les accusations criminelles. Même si l'argument est peu convaincant — à toutes fins utiles les avortements du premier trimestre sont considérés comme un droit de la femme — le droit de dire non était un aspect cohérent du système.

La déclaration de Macron concernant l' « irréversibilité » du changement constitutionnel qu'il espère obtenir est également inacceptable : si un parlement et un gouvernement pro-vie arrivaient au pouvoir en France, rien ne pourrait les empêcher de modifier la Constitution à leur tour. Certes, cela ne semble pas probable dans l'immédiat, mais il n'y a pas de fatalité à cela.

Nombreux sont ceux qui ont applaudi l'initiative de Macron, y compris l'ancien président François Hollande et l'actuel ministre de la justice, Eric Dupond-Moretti, qui étaient présents à la cérémonie d'hommage à Halimi. Claudine Monteil, historienne et féministe qui, à 21 ans, était la plus jeune signataire du Manifeste des 343, a qualifié la décision d' « historique », « au-delà de nos propres rêves ». Elle a rappelé que De Beauvoir lui avait dit, après le vote de la loi sur l'avortement par l'assemblée en 1974 : « Non, nous n'avons pas gagné définitivement, nous avons gagné provisoirement. Il suffira d'une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en cause. Toute votre vie, vous devrez rester vigilante. »

Le Planning familial français et d'autres groupes féministes ont exprimé leur satisfaction. Sylvie Pierre-Brossolette, présidente du Haut Conseil à l'égalité, a qualifié l'initiative de Macron de « couronnement du travail de Gisèle Halimi » et a ajouté qu'elle constituait « un pas important vers la garantie du droit à l'avortement en France et une avancée exemplaire pour le reste du monde ».

D'autres se plaignent que Macron aurait dû choisir la version édulcorée de la modification constitutionnelle en utilisant le mot « liberté » au lieu du mot « droit », tout en reconnaissant que cette décision pourrait faciliter l'adoption de la révision.

Le quotidien de gauche Le Monde a observé que le choix du concept de liberté plutôt que de celui de droit alignerait en fait la révision constitutionnelle sur la jurisprudence actuelle du Conseil constitutionnel français, qui a jusqu'à présent justifié la légalisation de l'avortement en se référant à l'article 4 de la Déclaration française des droits, qui définit la liberté comme la possibilité de « faire tout ce qui ne nuit pas à autrui ». En droit français, un enfant à naître n'est pas considéré comme « autrui ».

Marine Le Pen, chef du Rassemblement national (RN, ex-Front national) qui, historiquement, a largement rejeté l'avortement légal, a une fois de plus déçu la partie la plus conservatrice de son électorat en qualifiant l'initiative de Macron de « peu utile ».

Elle a ajouté que « personne ne remet en cause la liberté de recourir à l'avortement en France, pas un seul mouvement politique, pas une seule personnalité importante, pas une seule association ».

Non seulement les deux tiers des quelque 90 députés RN ont soutenu la constitutionnalisation de l'avortement lors du vote de la fin de l'année dernière, mais voilà que leur chef raye de la carte les mouvements pro-vie de France, faisant comme s'ils n'existaient pas.

La France s'apprête ainsi à devenir l'un des seuls pays au monde où l'avortement deviendra officiellement un pilier de la société et de la vie collective.



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