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Le prochain synode sur la synodalité a dans la mire les enseignements du Christ et de son Église


Le pape François et Mgr Victor Manuel Fernández.

Par Steven Mosher — Traduit par Campagne Québec-Vie — Photo : Twitter

8 août 2023 (LifeSiteNews) — Steven Mosher a récemment réalisé un entretien avec le président de l’Académie Jean-Paul II pour la vie humaine et la famille (JAHLF), le Dr Thomas Ward. La JAHLF a été créée il y a sept ans à la suite de la « réinvention » de l’Académie pontificale pour la vie (PAV), fondée à l’origine par le pape Jean-Paul II. Le Dr Ward lui-même, ainsi qu’un certain nombre d’autres membres ouvertement pro-vie de la PAV, ont été priés de quitter l’Académie par le nouveau président, Mgr Paglia, qui a depuis pris une direction très différente de celle voulue par le pape Jean-Paul II. En 2017, à la suite de ces licenciements, l’Académie Jean-Paul II pour la vie humaine et la famille a été fondée pour servir les mêmes objectifs que l’Académie pontificale pour la vie d’origine, à savoir l’étude interdisciplinaire et la défense de la vie humaine à tous ses stades. Ils poursuivent leur travail aujourd’hui, pleinement fidèles au magistère authentique et à la doctrine pérenne de l’Église catholique.

Steven Mosher : Dr Ward, en tant que président de l’Académie JPII pour la vie humaine et la famille, comment vous et les autres membres de l’Académie considérez-vous le prochain Synode sur la synodalité, qui se tiendra à Rome du 4 au 29 octobre ?

Thomas Ward : Comme beaucoup d’autres membres de notre Académie, je crains que le Synode sur la synodalité ne soit utilisé pour opérer un changement radical de paradigme dans la morale catholique sur la vie et la famille.

Steven Mosher : C’est une affirmation audacieuse qui va en choquer plus d’un. Pouvez-vous l’étayer ?

Dr Ward : Oui, je le peux. Permettez-moi de citer les paroles d’ecclésiastiques de haut rang qui travaillent ouvertement à ce changement radical de paradigme dans la morale catholique, à commencer par l’archevêque Vincenzo Paglia, que le pape François a nommé à la tête de l’Académie pontificale pour la vie (PAV). Selon les termes de l’archevêque Paglia, le rôle de la PAV est :

« d’accepter l’invitation contenue dans le paragraphe 3 de sa Constitution apostolique Veritatis Gaudium (la Constitution apostolique sur les universités et les facultés ecclésiastiques) à un changement radical de paradigme dans la réflexion théologique.

... rendre service au Magistère en ouvrant un espace de dialogue qui rende possible et encourage la recherche. C’est ainsi que nous concevons le rôle de l’Académie, que le Pape François lui-même a également voulu en première ligne sur des questions délicates à traiter par une approche transdisciplinaire. »

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Steven Mosher : Cette phrase frappante, « changement radical de paradigme », vient donc de François lui-même.

Dr Ward : Un paradigme est un cadre conceptuel. Les changements de paradigme en science surviennent lorsque le paradigme dominant est mis en crise par de nouvelles informations. Le résultat est que le paradigme précédent est remplacé par un nouveau cadre conceptuel ou un nouveau système de croyances. Mais gardez à l’esprit que dans ce cas, le « paradigme » en question est notre système de croyances catholiques.

Et, pour répondre à vos questions, l’expression provient du paragraphe 3 de l’encyclique Veritatis Gaudium du pape François, où il appelle à « un effort large et généreux pour un changement radical de paradigme, ou plutôt — oserais-je dire — pour une révolution culturelle audacieuse ».

Steven Mosher : En tant que personne connaissant intimement la tragédie de la révolution culturelle chinoise, l’appel à une « révolution culturelle audacieuse » a une résonance inquiétante.

Qu’ont fait Paglia et la PAV ces dernières années pour faire avancer la « révolution culturelle audacieuse » de François ?

Ward : Comme je l’ai mentionné, l’archevêque Paglia a organisé un séminaire d’étude interdisciplinaire qui a donné lieu à un livre intitulé Theological Ethics of Life : Scripture, Tradition, Practical Challenges (Éthique théologique de la vie : Écriture, tradition, défis pratiques). Publié par la PAV, ce livre était, selon les propres termes de l’archevêque Paglia, une tentative d’accepter l’invitation contenue dans Veritatis Gaudium à un « changement radical de paradigme dans la réflexion théologique ».

Il y a ensuite les déclarations publiques de Mgr Paglia sur des questions telles que le suicide assisté et l’avortement, dans lesquelles il refuse tout simplement de défendre l’enseignement clair de l’Église :

  • « Personnellement, je ne pratiquerais pas le suicide assisté, mais je comprends que la médiation légale peut constituer le plus grand bien commun concrètement possible dans les conditions où nous nous trouvons. » [1]
  • « Je pense que la loi 194 [qui a légalisé l’avortement volontaire en Italie en 1978] est désormais un pilier de notre vie sociale ». Lorsqu’on lui a demandé par la suite s’il avait l’intention de remettre en question cette loi, Paglia a répondu : « Non, absolument, absolument ! » [2]

Enfin, il est indéniable qu’un certain nombre des nouvelles nominations de Paglia à la PAV concernent des personnes qui sont en désaccord total avec l’enseignement de l’Église sur la contraception, l’avortement et l’euthanasie.  

Steven Mosher : En dehors de Paglia et de la PAV, qui sont les autres personnes qui collaborent avec François sur le « changement radical de paradigme » dont nous avons parlé ?

Dr Ward : Tout d’abord, nous devons comprendre que tout cela est antérieur à l’élection du Pape François. Par exemple, nous savons que l’ex-cardinal Theodore McCarrick a participé à des conversations sur l’élection du cardinal Bergoglio à la papauté. Il rapporte qu’un Italien influent lui a dit que le cardinal Bergoglio « pourrait réformer l’Église. Si nous lui donnions cinq ans, il pourrait nous remettre sur la bonne voie... il pourrait refaire l’Église ». [3]

Après l’élection de François, le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’État du Vatican, a rejoint le chœur. Parlant de la publication d’Amoris Laetitia, il a déclaré qu’elle marquait un « changement de paradigme » pour l’Église.

Aux États-Unis, des ecclésiastiques comme le cardinal Blaise Cupich contribuent à la « révolution culturelle » de l’Église au sein de son archidiocèse en redéfinissant, par exemple, les cours de préparation au mariage. Le cardinal Cupich a déclaré : « L’objectif principal de l’enseignement formel sur le mariage est l’accompagnement, et non la poursuite d’un ensemble de vérités abstraites et isolées. Cela représente un changement majeur dans notre approche ministérielle qui n’est rien de moins que révolutionnaire ».

Steven Mosher : Je me souviens que, dès sa fondation par le Christ, l’Église catholique a commencé à mener sa propre « révolution culturelle » bienveillante sur le monde païen, en particulier dans les domaines du mariage, de la famille et de la moralité sexuelle.

Dr Ward : Oui, on pourrait dire que l’Église a mené une révolution culturelle audacieuse dans ces domaines, qui a conduit à un changement de paradigme dans la pensée des gens.

C’est Kyle Harper, professeur de lettres classiques, qui a inventé l’expression « première révolution sexuelle » pour décrire le remplacement des mœurs sexuelles païennes de la Rome antique par la morale sexuelle chrétienne. Ce nouveau paradigme interdisait notamment les actes homosexuels et les relations sexuelles hors mariage. Ce changement de paradigme chrétien a considérablement amélioré le monde occidental et a été le paradigme dominant dans le monde occidental pendant près de deux mille ans.

Steven Mosher :  Les premiers pères de l’Église ont compris l’importance de rester fermes sur les questions de moralité sexuelle, n’est-ce pas ?  J’ai l’impression qu’ils n’ont pas contourné ce que Paglia appelle aujourd’hui des « questions délicates », mais qu’ils les ont abordées de front, comme le Christ lui-même l’a fait.

Dr Ward : Vous avez tout à fait raison. Prenez la Didachè : Doctrine du Seigneur transmise aux nations par les douze apôtres (Διδαχὴ Κυρίου διὰ τῶν δώδεκα ἀποστόλων τοῖς ἔθνεσιν), qui est notre plus ancien catéchisme écrit existant.  

La Didachè est datée par les chercheurs modernes du premier siècle et est le fruit de la deuxième génération d’écrivains chrétiens connus sous le nom de Pères apostoliques.

La Didachè indique clairement qu’il n’y a pas de juste milieu entre la culture païenne romaine de la mort et la nouvelle culture chrétienne de la vie.   « Il y a deux voies, l’une de la vie et l’autre de la mort, et il y a une grande différence entre ces deux voies », note la Didachè elle-même. Elle poursuit en interdisant spécifiquement le meurtre, l’adultère, la corruption des garçons, la promiscuité sexuelle, le vol, l’avortement et l’infanticide. Les chrétiens ont été informés en termes très clairs qu’ils ne devaient pas abandonner les commandements du Seigneur ni en soustraire quoi que ce soit.

Steven Mosher : En ce qui concerne le Synode sur la synodalité, pensez-vous qu’il fait partie de la « révolution culturelle audacieuse » qui doit conduire l’Église au « changement de paradigme » promis ? Je note que même les cardinaux les plus éminents ne parviennent pas à articuler clairement la signification de la synodalité, ce qui me laisse penser qu’il y a beaucoup de poudre aux yeux dans cette affaire.

Dr Ward : Je considère le prochain synode non seulement comme une composante de la révolution culturelle, mais plus encore comme le mécanisme par lequel le changement de paradigme doit être accompli.

Je m’explique. Le livre de Paglia, Theological Ethics of Life : Scripture, Tradition, Practical Challenges, était en fait une sorte de galop d’essai pour le prochain Synode. Lorsqu’on lui a demandé si « la discussion libre et ouverte dans le livre est un signe de synodalité », sa réponse a été un oui catégorique.

« Il n’y a pas d’autre voie, surtout lorsqu’il s’agit de questions aussi fondamentales que celles qui concernent les multiples dimensions de la vie humaine », a déclaré Mgr Paglia. « Nous avons suivi un chemin d’étude et de réflexion qui nous a conduits à voir les questions de bioéthique sous un jour nouveau, en commençant par le rôle du discernement et de la conscience formée de l’agent moral... C’est certainement un processus qui reflète l’ampleur synodale et le climat dans lequel le pape François souhaite que l’Église opère. »

Steven Mosher : Il semble que Paglia dise que les individus (les agents moraux) peuvent discerner eux-mêmes comment ils doivent se comporter à la lumière du monde moderne dans lequel nous vivons, et que le rôle de l’Église est simplement de les « accompagner » dans cette décision.

Dr Ward : Précisément. Et si l’Église devait accepter et embrasser des idées culturelles et scientifiques modernes prétendument supérieures sur la vie et la sexualité humaine, elle rejetterait ce faisant 2000 ans de doctrine magistérielle basée sur les enseignements de Jésus-Christ. Elle abandonnerait ainsi l’humanité au nihilisme néo-païen et renierait essentiellement son rôle salvateur.

Steven Mosher : Pensez-vous que ce sera le résultat du Synode sur la synodalité, en particulier en ce qui concerne la vie, la famille et la morale sexuelle ?

Dr Ward : Je suis très inquiet. Considérez les points de vue de ceux qui ont été placés en charge de cet exercice révolutionnaire. Le rapporteur — le rédacteur en chef et le gestionnaire — du Synode est le Cardinal Jean-Claude Hollerich, S.J. du Luxembourg, qui a publiquement épousé des enseignements et des pratiques qui sont clairement contraires à ce que l’Église a toujours enseigné. Le secrétaire du Synode est le Cardinal Mario Grech qui, bien que n’étant pas un théologien reconnu, affirme déjà l’importance doctrinale du Synode sur la synodalité.

Il y a aussi le père James Martin, S.J., qui est bien connu pour sa défense ininterrompue des LGBT. Nommé personnellement par le pape François pour participer au synode, Martin a immédiatement célébré cela comme une victoire pour les homosexuels, déclarant : « Pour de nombreuses personnes LGBTQ, habituées depuis si longtemps à ne même pas être mentionnées — et encore moins écoutées — il s’agit d’un pas en avant historique. En tant que tel, le Synode a été, dans une église d’ombre et de lumière pour les personnes LGBTQ, une lumière indéniable ».

Le développement révolutionnaire le plus alarmant de ces dernières semaines a sans doute été la nomination par le pape de l’archevêque Victor Manuel « Tucho » Fernández au dicastère pour la doctrine de la foi. Mgr Fernández aurait reçu pour instruction de ne pas se contenter de relayer « l’enseignement pérenne de l’Église », mais de veiller à ce que le « magistère récent » de François soit pris en compte et d’éviter de corriger les « erreurs doctrinales ».

Rorate Caeli rapporte que « Fernández a déclaré que François lui avait dit de “promouvoir la pensée et la réflexion théologique en dialogue avec le monde et la science, c’est-à-dire, au lieu des persécutions et des condamnations” ». [4]

Cela me semble être une sorte d’attaque préventive contre ceux qui défendent l’enseignement pérenne de l’Église, pas moins qu’un encouragement aux révolutionnaires culturels à être, comme François l’a dit plus tôt, « audacieux ». Fernández semble peu enclin à s’opposer au « changement de paradigme » proposé par ceux qui gèrent le Synode sur la synodalité, quelque radical qu’il soit.

Steven Mosher : En politique, nous disons souvent que les gens sont la politique, c’est-à-dire que le type de personnes que vous nommez à des postes d’autorité prédétermine en quelque sorte le résultat. Pensez-vous que la nomination des Cardinaux Hollerich et Grech à des postes de direction au sein du Synode « prépare le terrain » en faveur de points de vue hérétiques ?

Dr Ward : Absolument. Et les plus courageux défenseurs de la foi catholique de notre époque le font également. Le regretté et grand cardinal George Pell, par exemple, a noté que « le cardinal Jean-Claude Hollerich a publiquement rejeté les enseignements fondamentaux de l’Église sur la sexualité, au motif qu’ils contredisent la science moderne ». Il a ajouté qu’« en temps normal, cela aurait signifié que son maintien en tant que rapporteur [du Synode] était inapproprié, voire impossible ».

La nomination du cardinal Grech en tant que secrétaire du synode, ainsi que ses commentaires ultérieurs sur les changements révolutionnaires que le synode pourrait entraîner, ont suscité l’objection du cardinal Gerhard Müller. L’ancien chef du bureau doctrinal du Vatican a déclaré que, bien que « Le cardinal Grech, en parlant de la réception correcte de l’ecclésiologie du Concile à la lumière du Synode, se présente comme une super autorité, il n’est pas un théologien reconnu, il n’a aucune importance dans la théologie académique... il présente une nouvelle herméneutique de la foi catholique uniquement parce qu’il est le secrétaire du Synode, qui n’a aucune autorité sur la doctrine de l’Église ; et tous ces synodes d’évêques [menant au Synode sur la synodalité] et le processus n’ont aucune autorité, en aucun cas une autorité magistérielle. »

Interrogé sur l’importance accordée à la communauté « LGBTQ », le cardinal Müller a répondu que « le but de cette idéologie est d’instrumentaliser l’Église catholique pour promouvoir ses propres idées ».

Le mot de la fin revient au grand cardinal Raymond Burke qui, se référant aux commentaires du Synode sur la supposée nécessité de moderniser l’enseignement de l’Église pour se conformer à la société et à la science, a déclaré ce qui suit : « Ce sont des inventions humaines, des idéologies humaines qui sont poussées et l’Église est utilisée... presque comme une agence gouvernementale qui est manipulée pour favoriser certains programmes et certains agendas. Nous devons donc nous réveiller pour comprendre ce qui se passe ».

Il y a deux millénaires, la Didachè nous avertissait qu’« il y a deux chemins, l’un de vie et l’autre de mort, et qu’il y a une grande différence entre ces deux chemins ».

Si, à Dieu ne plaise, une révolution immorale menée par des ecclésiastiques « catholiques » parvenait à réinstaurer les mœurs sexuelles païennes dans l’Église, ce serait comme si le Christ n’avait jamais foulé le sol de cette terre.

Ce n’est pas possible.

Steven Mosher : Non, ce n’est pas le cas. Et nous avons la promesse de Notre Seigneur que les portes de l’enfer ne prévaudront pas contre son Église. Mais il me semble que nous, les laïcs, devons aussi faire notre part, et dans les semaines qui précèdent le Synode d’octobre, élever nos prières vers le ciel pour cette intention, et faire part de nos préoccupations à nos prêtres et à nos évêques.

Dr Ward : Vous avez raison de terminer sur une note d’espoir, et c’est un espoir que je partage avec vous.

Souvenons-nous tous, comme l’écrit le cardinal Müller dans son nouveau livre, True and False Reform : What it Means to be a Catholic : « Jésus-Christ est le nom de la seule révolution qui mérite d’être appelée ainsi, non seulement parce qu’il a fait quelque chose de mieux pour la prochaine fois, mais parce qu’il a fait tout ce qui est bon et nouveau pour toujours ».


Références

[1] Mgr Paglia, 19 avril 2023, dans un discours au Festival international du journalisme à Pérouse, Italie.

[2] Mgr Paglia, 26 août 2022, dans une interview télévisée avec Rai Tre

[3] Entretien avec le cardinal McCarrick concernant le conclave de 2013. Transcription par Peter Baklinski, LifeSiteNews.

[4] Rorate Caeli, 15 juin 2023



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