Par Sarah Terzo (LiveActionNews) — traduit par Campagne Québec-Vie — Photo : Pixabay
Le livre d’Abby Johnson, The Walls Are Talking : Former Abortion Clinic Workers Tell Their Stories (Les murs nous parlent : Histoires d’anciennes employées de cliniques d’avortement), contient des témoignages d’anciennes employées ayant travaillé pour l’industrie de l’avortement. Ces histoires ont des thèmes différents, et chacune d’entre elles présente un évènement ayant marqué une employée. L’une de ces histoires, nommée « Frequent Flyers » (voyageuses fréquentes), concerne une jeune femme qui a eu neuf avortements.
L’auteur de ce chapitre, gardant l’anonymat, explique que les femmes venant se faire avorter à répétition à son lieu de travail se faisaient appeler « frequent flyers » par le personnel. Même si les employés étaient dévoués à promouvoir et à fournir des avortements, plusieurs d’entre eux avaient des sentiments de réprobation à l’égard de ces « frequent flyers ». L’ancienne employée raconte :
« Lorsqu’Angie est arrivée pour sa neuvième procédure, même ceux d’entre nous dont le salaire reposait sur ces avortements ont secoué la tête et ont dit “Vraiment? Tu es sérieuse?”
Bien que cela allât à l’encontre de ma propre idéologie, je voulais qu’Angie démontre un peu de remords. Je ne voulais pas éprouver ce sentiment envers les nombreuses femmes qui venaient pour deux, trois ou même quatre avortements, mais neuf? Cela, je le sentais, méritait au moins une minime expression de regret ou de honte. »
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Angie n’a fait preuve d’aucun signe de culpabilité ou de détresse quand elle a franchi les portes de l’établissement. Elle avait ri lors de son premier avortement, et pour tous ceux qui avaient suivi. Rien n’avait changé lors de sa neuvième entrée en clinique. L’employé a décrit le comportement de la jeune femme :
« Elle semblait prendre ses visites à notre clinique comme étant une occasion de jouer sa comédie “Pourriez-vous juste photocopier mes papiers et j’écrirai la date?” Elle faisait des blagues. Une fois les papiers complétés, Angie essayait de badiner avec les autres filles de la salle d’entente : “Ce n’est pas grand-chose, je l’ai fait huit autres fois auparavant et je n’ai aucun regret.” Même si je ne pouvais qu’aimer Angie, sa légèreté me consternait. »
Elle ne montrait aucun signe de culpabilité ou de remords :
« Au fil des années, j’ai consolé et j’ai tenu la main de nombreuses femmes, qui se dirigeaient vers la même table d’opération avec beaucoup d’appréhension. Quelques-unes d’entre elles sanglotaient, leurs jointures devenues blanches à force de me serrer la main si fortement. D’autres tenaient une bible contre leur poitrine et récitaient des prières pour demander pardon alors que l’avorteur n’avait même pas encore commencé son travail et que leur bébé était encore sain et sauf dans leur ventre. Maintes fois, les femmes allaient s’installer sur la table d’opération et restaient molles et peu réactives durant toute la procédure. Mentalement, elles étaient à des millions de kilomètres d’ici. Et puis, il y avait Angie… Elle n’a jamais tenté de s’expliquer ; lorsque nous lui parlions de contraception [qui est mauvaise aussi — NDLR] et tentions de lui donner un rendez-vous pour de plus amples informations, elle se contentait de sourire et de refuser poliment d’un simple geste de la main. »
Angie utilisait l’avortement comme moyen de contraception, ne prenant pas la peine de connaître d’autres méthodes. Son nombre d’avortements allait peut-être encore grimper, mais quelque chose arriva.
Il ne fait aucun doute qu’Angie avait déjà entendu la rhétorique proavortement. On lui avait surement dit qu’un avortement consistait « seulement » à retirer une poignée de cellules, un morceau de tissus ou une masse non développée. Cependant, après sa neuvième procédure, Angie fut curieuse et voulut voir de ses propres yeux le « morceau de tissu ». Elle demanda à l’employée de la clinique de lui montrer les restes de l’avortement et celle-ci respecta sa décision. À 13 semaines, son bébé était complètement formé.
« Je me suis demandé comment j’allais arranger les pièces. Vaudrait-il mieux les mettre en tas de telle sorte qu’on ne pût reconnaitre les parties du corps, ou bien devrais-je, comme à l’habitude, tout reconstituer afin de m’assurer qu’il n’y a aucune partie manquante? Il n’y avait aucun protocole en pareil cas, aussi je remis les morceaux ensemble. »
La réaction d’Angie n’était pas celle qu’anticipait l’employée :
« “Merci”, répondit-elle, sans perdre son fameux sourire. Cependant, lorsque son regard s’est tourné vers le récipient, elle haleta brusquement et demeura silencieuse pour la première fois depuis son arrivée à la clinique. Après quelques instants, son corps entier frissonna et la chair de poule se dressa sur ses bras.
Lorsqu’elle tendit le bras pour toucher le bébé, j’ai tenté de retirer le plat hors de sa portée, mais elle agrippa mon poignet pour m’arrêter. Nous sommes restées silencieuses pendant quelques instants alors qu’elle fixait toujours le récipient. Je me suis reculée et Angie tomba à genoux, ses doigts toujours agrippés à mon poignet. Les filles de la salle de récupération commencèrent à nous observer, ce qui augmenta grandement mon inconfort. »
Ayant réalisé son erreur, l’employée tenta à plusieurs reprises de reprendre le plat contenant les parties sanglantes du corps, mais Angie ne voulait pas se détacher des restants de son enfant. L’employée continue :
« Angie restait figée au sol. “C’est un bébé”, disait-elle d'une voix, à peine audible. “C’était mon bébé”. Le ton de sa voix augmentait alors qu’un torrent de mots s’échappait de sa bouche. Les paroles qu’elle prononçait mettaient les gens très mal à l’aise. “Qu’est-ce que j’ai fait? Qu’est-ce que j’ai fait?” répétait-elle encore et encore. Elle se mit à pleurer et certaines filles commencèrent à sangloter avec elle. D’autres couvraient leur visage avec leur bras ou enfonçaient leur tête dans le bras des fauteuils inclinables. »
Les employés réussirent finalement à reprendre le récipient. D’autres sont venus calmer Angie, car celle-ci était devenue hystérique.
« Certains de mes collègues sont rapidement venus m’aider pour calmer Angie. Après quelques minutes, il est devenu évident qu’elle n’allait pas s’apaiser. On ne pouvait même pas la soulever de terre. Après avoir discuté à la hâte, nous avons décidé de la traîner vers les toilettes. Au moins, la lourde porte allait couvrir le son de ses sanglots pendant que nous penserions à une solution.
Alors que nous trainions Angie dans le couloir, celle-ci agitait ses jambes ainsi que ses bras de manière incontrôlable et ses cris devenaient de plus en plus stridents. Nous étions en train de nous donner en spectacle devant toutes les autres filles de la salle de récupération. Enfin, nous avons réussi à amener la jeune femme toujours paniquée aux toilettes et avons fermé la porte. Je lui ai suggéré de s’asperger le visage d’eau froide et d’essayer de se ressaisir, mais ses pleurs, quoiqu’atténués, étaient encore facilement audibles de l’autre côté de la porte. »
Angie commença à supplier les employés pour qu’elle puisse amener son bébé mutilé chez elle. Elle ne voulait pas se séparer de son enfant, même si ce dernier était mort. Elle supplia les employés de céder et de lui donner son bébé, mais sa demande fut refusée. Angie continua à pleurer et à se lamenter dans les toilettes, ce qui perturba l’établissement au complet.
Les employés consultèrent son dossier et trouvèrent son contact d’urgence (le numéro de téléphone que l’établissement devait composer en cas de complication mettant la vie de la femme en danger). Ils composèrent le numéro et joignirent son copain. Après son arrivée à la clinique, il fallut 45 minutes à l’homme pour convaincre Angie de sortir des toilettes. Le couple quitta la clinique en pleurant.
Depuis ce temps, Angie n’est jamais revenue à la clinique. L’auteur de l’histoire ne sait pas ce qu’il lui est arrivé. La route devant elle, une fois qu’elle sera consciente de sa responsabilité dans la mort de neuf de ses enfants, sera atroce à parcourir. Nous pouvons seulement espérer qu’elle ait trouvé la guérison.
Depuis cet incident, la clinique a instauré la règle de ne jamais montrer les bébés aux femmes après l’avortement. Une autre scène comme celle d’Angie aurait risqué de ralentir les procédure de l’établissement et d'affecter les profits. Plus de femmes en auraient appris sur le développement du fœtus ce qui aurait fait diminuer le nombre d’avortements. L’établissement a interdit de montrer aux femmes leurs bébés après la procédure afin que tout se déroule bien.
Quelques temps plus tard, l’employée de la clinique d’avortement quitta son poste. Elle n’a pas donné ses raisons, mais l’histoire d’Angie et son agonie émotionnelle ont sans aucun doute influencé son choix.
Combien de femmes vont se faire avorter sans savoir où en est rendu le développement de leur enfant ? Combien de patientes se font avorter à répétition sans savoir que leur bébé se fait démembrer et qu’ensuite ces membres sont jetés avec les ordures ou vendus? La vérité est le véritable ennemi de l’avortement ; un fait que l’ensemble des employés de la clinique d’avortement a découvert cette journée-là. Ils se sont fait rappeler qu’il est vital de tenir les faits loin des femmes vulnérables si l’avortement doit leur être vendu. Pour la clinique, il s’agissait du seul moyen de continuer à leur soutirer de l’argent.
Source : Abby Johnson The Walls Are Talking: Former Abortion Clinic Workers Tell Their Stories (San Francisco, Californie : Ignatius Press, 2016) 71-77