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Enceinte à dix-sept ans, elle refuse de se faire avorter. Aujourd'hui, elle appelle sa fille son « cadeau du ciel »

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Par Marybeth Mitcham, 2015 -- traduit par Campagne Québec-Vie

Selon le calendrier que je me suis fixé comme adolescente, il y a 18 ans et demi, je devrais maintenant être en mesure de vivre ma vie.

J’étais enceinte à dix-sept ans. J’avais épousé le papa de mon bébé afin de garantir un foyer à l’enfant à naître.

Ce serait mentir que de dire que ça a été facile.

Ça a été tout le contraire.

J’étais la fille d’un pasteur protestant, et mon petit ami était fils du diacre. Nous étions étudiants tous les deux, moi en première année de prépa-médecine, lui en tant qu’athlète-boursier au collège. Aucun d’entre nous ne pouvait prévoir qu’un enfant allait un jour chambouler nos vies. Nous avions prévu de nous marier plus tard. Vu la situation, nous avions décidé de prendre les devants pour vivre un moment de vie en couple avant que n’arrive l’enfant.

Lorsque je regarde en arrière, je m’étonne à la pensée de notre courage d’alors. Savoir que nos existences étaient changées du tout au tout, a eu, pour nous, l’effet d’un choc. Combien a été difficile la lourde tâche de dire à nos parents que nous avions commis une faute. Et quelle honte quand tout le monde sait ce qu’un moment d’égarement peut causer de tracas, d’ennuis.

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Nos existences se sont retrouvées sens dessus dessous et déchirées de bout en bout.

Et ça n’a été qu’un début.

Je savais que quelque chose n’allait pas bien lorsqu’une hémorragie survint le jour de mon mariage. Mes doutes se confirmèrent lorsque le médecin nous a dit que notre bébé souffrait d’une grave malformation. C’est pour ça que je saignais et que je me sentais mal.

Le médecin annonça le diagnostic: un cas de gastropschisis, c’est-à-dire une lésion ouverte de l’abdomen due à la croissance avec portion intestinale dépassant hors du tissu fœtal. On nous annonçait d’autres complications encore: à la naissance prématurée, s’ajoutaient les risques de déficiences mentales, la nécessité d’une intervention chirurgicale postpartum. Sans oublier la perspective d’une croissance incertaine ou le risque sérieux de mortalité lié à cet état.

Il nous a été fortement recommandé d’avorter.

On nous a même dit que nous serions égoïstes et cruels de ne pas avoir recours à l’avortement et de permettre qu’un enfant souffre avec seulement quelques années à vivre.

Que faire lorsque deux ados sont confrontés à des choix pareils?

Que faire lorsqu’on vous dit que votre enfant mourra prématurément à la naissance et que, s’il survit, il aura une vie semée d’embûches? Qu’il serait mieux, pour son bien, de l’avorter?

Avorter, c’est comme si votre enfant soudain s’endormait, m’assurait-on...

J’aurais pu gagner ma liberté. Sans marmot dans les bras, je ne sacrifiais ni études ni carrière au profit d’un «autre» ...

Que le corps médical ait été poussé par de louables intentions, je n’en ai aucun doute. Les médecins savaient à quels sacrifices je m’exposais, en plus des nombreux obstacles à surmonter, si je choisissais de prolonger la gestation. Ils pensaient me libérer d’un lourd fardeau en faisant usage d’un bon argument. Mettre à bas les chaînes qui poseraient obstacle à la pleine réalisation de mes études et de mes objectifs professionnels, toujours à portée de main.

Mon mari et moi avions été éduqués au respect des valeurs de l’existence. Même si nous étions conscients d’avoir agi en dehors du plan de Dieu dans nos vies, nous étions aussi convaincus de l’innocence de notre bébé. Notre enfant nous avait été confié pour que nous le protégions et nous occupions de lui.

Les deux ados que nous étions avaient choisi la vie.

Aussitôt, les rendez-vous chez le médecin ne tardèrent pas à se multiplier. Sans compter les changements de plans et les nombreux imprévus. Nous consultions les chirurgiens. Nous allions régulièrement à l’unité de soins intensifs pour nouveaux-nés. Nous avions choisi d’élire domicile tout près de l’hôpital. Nous sollicitions aussi nos amis pour qu’ils veillent à notre intention dans la prière.

Prouver aux autres, ainsi qu’à moi-même, que j’accomplissais mon devoir était une tâche suffisamment difficile. Prouver que je deviendrais une bonne maman malgré mon jeune âge l’était tout autant!

Enceinte, je n’avais pas été une bonne maman.

Je ne pouvais garantir la sécurité de mon enfant.

Le jour où l’un des responsables religieux de notre communauté me déclara, avec les meilleurs intentions du monde, que la malformation de mon enfant était une punition de Dieu, j’étais restée bouche bée.

Devant de telles accusations, que doit faire une ado apeurée devant la vie?

Même si je savais qu’ils étaient faux, ces propos me blessèrent profondément. Je me souviens encore de l’effet que cette déclaration produisit sur moi. C’était comme si quelqu’un avait carrément creusé un trou dans mon ventre. Je ne me souviens plus de ma réaction d’alors. Mais je me rappelle de l’effet que ces paroles eurent sur moi et qui avaient tôt fait de me réduire en poussière.

Honte.

Inutile.

Désemparée.

Malgré ces difficultés, je continuais à prier. J’étais convaincue que Dieu allait opérer un miracle malgré toutes les contradictions et qu’il guérirait mon enfant.

Mes prières n’ont pas été exaucées, pourtant, et ma fille est née par césarienne de façon prématurée à trente-deux semaines seulement.

Quand le chirurgien souleva son corps fébrile, et que j’entendis ses cris désapprobateurs, j’ai immédiatement compris que j’avais mis au monde un bout de chou qui ne se laissera pas abattre.

Les infirmières me montrèrent mon bébé, l’intestin grêle était enveloppé par précaution de la tête aux pieds. Je l’ai embrassée avant qu’elle ne soit transférée au bloc opératoire. J’étais déjà follement amoureuse de l’enfant que j’avais fait naître.

Je ne m’attendais pas à une telle réaction de ma part, je dois l’avouer.

Je parle aujourd’hui en mon nom personnel. Pouvais-je un jour savoir à quel point un parent est capable d’aimer son enfant, être si petit et sans défense? Ce petit d’homme, qui avait ruiné tous mes projets! Obstacle qu’il était à ma pleine réalisation.

Et pourtant, en un seul instant, ma fille était devenue l’objet de toutes mes espérances et le rêve de ma vie.

Mon bébé.

Comment était-elle?

Les choses allaient-elles bien se dérouler?

L’intervention chirurgicale avait-elle été un franc succès?

Le reste était désormais secondaire. Tout ce qui m’importait le plus au monde, c’était la santé de mon enfant.

Quelques heures s’écoulèrent et le même chirurgien nous appela pour nous annoncer qu’un miracle avait eu lieu. En effet, on avait réussi à réintroduire l’intestin dans le petit corps en une seule et unique fois. L’état du bébé était stable. Nous pourrions même revoir la petite le lendemain.

Même sous l’effet puissant des calmants, j’ai pleuré comme une Madeleine.

Durant les six semaines qui suivirent l’opération, nous allions régulièrement visiter notre fille à l’unité des soins. Sans pouvoir ni la toucher ou la porter cependant, parce qu’elle était en convalescence. Mais nous pouvions lui parler, fredonner des chansons, faire sentir notre présence. Le personnel hospitalier avait pris l’habitude de nous voir. Les infirmières nous faisant la remarque que, jeunes parents que nous étions, nous nous trouvions plus souvent à la maternité que les autres parents. Bientôt, nous portions notre fille dans les bras. Quant à moi, je l’allaitais. Mon grand bonhomme de footballer de mari la berçait en lui chantant des airs connus. Nous apprenions ainsi à connaître notre bébé né prématurément lequel, au demeurant, devait subir, par la suite, d’autres interventions chirurgicales.

Six semaines après sa naissance, notre fille était à la maison.

Je ris en pensant que la jeune adolescente que j’avais été naguère croyait que le fait d’avoir son enfant chez soi allait simplifier les choses. Les difficultés, au contraire, allèrent de mal en pis à mesure que la petite grandissait.

Je faisais face aux adversités, moi jeune maman avec une enfant dans les bras. Pensant combler mes inaptitudes de jeune mère, voulant trop donner de leçons ou trop vouloir bien faire, je pense, tout compte fait, avoir peu montré de patience dans l’éducation de ma fille. Ce temps précieux à vivre des moments privilégiés en famille fila entre mes doigts.

C’est, je pense, ce que je regrette le plus.

Journées interminables, insomnies, cris, activité sans répit: autant de choses qui m’ont empêchée de vivre la joie du moment présent. Trop préoccupée que j’étais à subvenir aux multiples besoins matériels et spirituels de ma fille. Ce fut un défi tel, qu’à chaque nouvelle saison j’entretenais l’espoir de nouvelles consolations. Il n’y en a pas eu. A chaque saison nouvelle, je regrettais celle qui venait de s’écouler.

Des parents plus âgés que moi m’avertirent que j’allais me réveiller un jour et me surprendre à la vue de ma fille adulte. En fait, je ne me faisais pas à l’idée qu’elle pouvait un jour grandir.

Aujourd’hui, je me rends compte qu’ils avaient raison.

Mon bébé a bel et bien grandi, même si je ne suis pas prête à me l’avouer.

Ma fille est une lutteuse née. Dotée d’une volonté d’acier, plus qu’aucune autre. Têtue comme une mule, sa personnalité est à l’image de sa crinière de cheveux roux. Jamais elle ne permettra qu’on la corrige. Une fille qui dépasse les limites à tous les instants. Et adore faire plaisir.

Fille au grand cœur: plus qu’aucune autre. Avec un sens aigu de la justice, elle aime venir en aide aux faibles et ceux qui souffrent. L’amour qu’elle me témoigne se traduit aussi en ces bouquets de fleurs sauvages qu’elle me confectionne. Douée aussi pour le dessin au fusain, c’est quelqu’un qui cherche constamment à me rendre la vie plus agréable.

C’est elle, mon chef d’œuvre.

Il y a dix-huit ans, lorsque j’appris que j’étais enceinte d’elle, j’entretenais l’espoir de voir ma fille grandir un jour et atteindre le même âge que moi. Alors seulement, pensais-je, je pourrais redevenir moi-même.

Dix-huit ans ont passé, et je regrette de ne pas pouvoir faire marche arrière pour reprendre à zéro l’éducation de ma fille.

Le chemin n’a pas été de tout repos. Je m’étonne souvent que mon mari et moi, avec la grâce de Dieu, nous en sommes arrivés, bon an mal an, à un résultat aussi exaltant. Je regarde notre fille, si belle, et suis si heureuse à la seule pensée que nous avions un jour opté pour la vie et joyeusement relevé le défi posé par l’éducation de notre fille.

A ma fille: tu es le plus grand cadeau du ciel que je ne pouvais jamais espérer. Je t’aime plus que la vie même et suis fière d’être ta maman. C’est même pour moi un honneur. Joyeux anniversaire à l’occasion de tes dix-huit ans ma chérie! Et combien ne suis-je pas contente de ne pas avoir eu la vie que j’aurais voulu avoir! Jamais, je ne pourrai imaginer une vie sans toi.



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