Sur le site de Famille Chrétienne du 26 novembre 2014, une entrevue avec Tugdual Derville, l'un des fondateurs du Courant pour une écologie humaine :
(Photo : cbecker-tours sur flickr.com, licence creative commons)
Quelle est votre définition de l’écologie humaine ?
J’en trouve à chaque fois une nouvelle ! L’écologie humaine est la prise en compte de l’homme dans son environnement, de tout l’homme dans toutes ses dimensions (physiques, psychiques, spirituelles) et de tous les hommes, du plus fragile au moins fragile, dans son environnement familial, social, culturel, et physique. C’est prendre soin de l’homme dans son écosystème qui le dépasse. De cette écologie humaine, nous avons bénéficié du seul fait de notre survie.
(...)
Vous dites que la bienveillance, que prône l’écologie humaine, part de la famille ?
La bienveillance, clé des relations interpersonnelles dans la société, s’apprend d’abord dans la famille avec des parents qu’on n’a pas choisis. La première école de la bienveillance est la famille, l’unité de la personne s’y forme. Certes, nous sommes confrontés à deux visions de la société qui sont incompatibles. Soit l’homme est un loup pour l’homme, soit il est fait pour se donner.
Le parti pris anthropologique de l’écologie humaine est la culture du don, de l’altruisme. Nous avons besoin de nous donner pour être heureux, et même pour être vraiment libres. Au début de notre vie, ne s’est-on pas donné pour nous, gratuitement ? Le choix de la culture du don est au centre de notre projet. C’est une anthropologie réaliste que fonde la bienveillance : chacun veille au bien. L’être humain ne survit que parce que d’autres ont longuement veillé à son bien-être, à son déploiement, à son développement presque jamais achevé.
Nous prônons une culture de la vulnérabilité qui assume notre besoin de veiller les uns sur les autres pour devenir nous-mêmes.
Contrairement à l’animal, nous avons besoin de nous habiller pour ne pas avoir froid ; nous avons besoin de technologie pour boire de l’eau, contrairement à d’autres mammifères. Nous sommes vulnérables et il nous faut consentir non seulement à cette fragilité du début et de la fin de notre vie, mais aussi à celle que nous rencontrons, au plus fort de notre vie, quand nous prétendons être « autosuffisants ». Face à l’illusion de l’autonomie, à l’individualisme, qui éclatent la société en exclusion des plus faibles, nous prônons une culture de la vulnérabilité qui assume notre besoin de veiller les uns sur les autres pour devenir nous-mêmes.Quand Simone de Beauvoir affirme : « On ne naît pas femme, on le devient », elle a tort et raison. Nous naissons femme ou homme, mais nous sommes sans cesse appelé à le devenir davantage par la culture, qui nous aide à assumer les trois dures et belles limites de notre condition humaine : un corps sexué, un temps compté, et une mort inéluctable.
Le couple est le lieu où les larmes sont autorisées, où la nudité psychique, physique et spirituelle est possible. Nous y sommes appelés à une sorte de transparence, pour y être aimés avec nos limites, tels que nous sommes. Dans la relation amoureuse, nous avons besoin d’être aimés inconditionnellement.
(...)
Ma conviction profonde est que le cœur de l’homme est épris de bien. Les êtres humains ont besoin qu’on leur dise le bien dont ils sont capables. Chacun est même capable d’héroïsme. Les parents sont capables de se donner pour leurs enfants. Les personnes capables d’exclure et ou de rejeter la vie sont aussi capables de l’accueillir et de la donner. Dans l’élan de l’écologie humaine, nous osons dire que nous sommes capables de bâtir ensemble une société meilleure.
Une entrevue à lire!
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